Le vendredi 5 octobre, la justice allemande a interdit au conglomérat allemand de l’énergie RWE de déboiser la forêt de Hambach, dans l’ouest du pays, tant que le recours sur le fond de ce projet, déposé par l’association allemande Bund qui s’appuie sur une directive européenne sur la protection de la faune et la flore, n’aura pas donné lieu à un jugement. Une victoire pour les militantEs anti-charbon allemands et, au-delà, pour le mouvement écologiste dans son ensemble. 

Depuis sa sortie du nucléaire, l’Allemagne est souvent présentée comme modèle écologique. Mais ce modèle présente une contradiction : 40 % de son énergie est encore produite par le charbon, notamment par le charbon lignite, énergie la plus polluante au monde. Située en Rhénanie du Nord, la mine de Garzweiler est la plus grande fosse d’Europe destinée à exploiter le charbon. Elle a été achetée par l’entreprise RWE dans les années 1970, et continue depuis à s’étendre, vidant des villages dont les habitantEs sont expropriés de force, contre une indemnisation de RWE. Les substances rejetées par la production du charbon nuisent à la santé des habitantEs des alentours. L’exploitation du charbon va en outre à l’encontre des engagement de la COP21 contre le réchauffement climatique.

Lutte contre les intérêts capitalistes

La forêt de Hambach est devenue un symbole de la lutte contre l’exploitation du charbon. Vieille de 2000 ans, cette forêt doit a son tour être détruite pour permettre à RWE d’exploiter le charbon de son sous-sol. 150 à 200 militantEs y vivent depuis six ans pour empêcher ou freiner la destruction de la forêt, dans des cabanes situées dans les arbres, à plusieurs mètres du sol.

L’entreprise RWE est pourtant décidée à faire valoir ses droits sur un terrain qu’elle a acheté. Car renoncer à exploiter la forêt de Hambach lui ferait perdre quatre à cinq milliards d’euros. De plus, le charbon lignite étant une énergie particulièrement peu chère à produire, elle permet à l’Allemagne de faire fonctionner son industrie à bas prix. C’est donc une âpre lutte entre les intérêts capitalistes et ceux de la majorité de la population qui se joue.

L’entreprise devait commencer à exploiter la forêt à partir du 1er octobre, mais ce projet a été repoussé en raison de la résistance menée sur place. Le 13 septembre, une importante opération de police a commencé pour évacuer les occupantEs. 3500 policiers sont présents en permanence sur place, des canons à eau sont utilisés, l’opération est comparée à celle du G20 l’année dernière. Dans une atmosphère de tension permanente où les cabanes sont systématiquement détruites, des dizaines de personnes ont été arrêtées ou blessées. C’est dans ces circonstances qu’un journaliste a trouvé la mort le 19 septembre dernier, en faisant une chute de quinze mètres de haut alors qu’il cherchait à filmer l’intervention de la police.

La résistance continue de s’organiser

Malgré la répression, la résistance continue de s’organiser. Des actions de soutien ont lieu tous les jours, mobilisant des milliers de personnes. Le 6 octobre, la justice allemande a rendu la décision d’interdire le déboisement de la forêt de façon temporaire, tandis que 50 000 personnes se rassemblaient contre le charbon. Le plus grand rassemblement depuis le début de la mobilisation.  Le 12 octobre, ce sont les lycéenEs qui sont à leur tour descendus dans la rue.

Selon un sondage effectué par le journal Die Zeit, 75 % des AllemandEs s’opposeraient à la destruction de la forêt. La lutte pose aussi la question de la démocratie : l’État soutient en effet l’entreprise RWE, alors que la majorité de la population s’y oppose. Une victoire définitive serait dès lors une avancée d’ampleur pour le mouvement écologiste en Allemagne, et au-delà.

Un problème essentiel, qui demeure posé, est celui du positionnement des travailleurEs de RWE. Leur syndicat dénonce ainsi les violences commises contre les policiers, qui travaillent au défrichage de la forêt en lien avec les employés de RWE… La peur des employéEs de RWE de perdre leur emploi est évidemment légitime, mais il apparaît évident que l’exploitation du charbon ne peut offrir des emplois sur le long terme, car les ressources de la mine devraient être épuisées en 2045. La perspective défendue par le mouvement écologiste est donc de reconvertir les emplois dans les énergies renouvelables, où les compétences des travailleurEs de RWE pourraient être utilisées…

Publié sur le site du NPA.