Cela fait des années que l’impact de la production massive d’huile de palme sur l’environnement (forêts et tourbières tropicales) est dénoncé. L’écologiste marxiste suédois Andreas Malm classe l’huile de palme parmi les productions dominées par l’agro-business les plus nuisibles aux écosystèmes et responsables de la déforestation massive (voir l’article sur son ouvrage la Chauve-souris et le capital dans le numéro de novembre de la revue l’Anticapitaliste). Dans les pays traditionnellement producteurs, l’huile de palme est un ingrédient alimentaire. Ce qui pose avant tout problème, c’est l’utilisation massive de cette huile par les industries des pays non-producteurs (agro-alimentaire, cosmétiques, agro-carburants). La consommation mondiale d’huile de palme pourrait atteindre 40 millions de tonnes en 2020, contre 22,5 millions de tonnes en 2010.
Mais la production massive d’huile de palme pour l’industrie n’est pas qu’un problème écologique. Les conditions des travailleurEs des plantations relèvent de la pire exploitation : travail forcé, travail des enfants, violences sexuelles ou physiques, entrave à la libre circulation, retenues sur salaires.
En 2016, Amnesty International avait publié un rapport dénonçant le travail des enfants et le travail forcé dans les plantations indonésiennes de palmiers à huile. Aujourd’hui, ce sont les plantations malaises qui sont décrites dans une enquête de l’agence étatsunienne Associated Press (AP). En Malaisie (2e producteur au monde après l’Indonésie) près de 80 % de la main-d’œuvre est étrangère. Selon l’enquête d’AP, le quotidien de nombreux travailleurEs est à l’image de celui de Jum, dont le patron a confisqué le passeport puis l’a perdu, l’obligeant à rester dans la plantation et à se cacher des autorités en dormant à même le sol dans la jungle. Sa plus grande peur ? Les tigres. « Je ne suis plus un homme libre », confie-t-il à l’agence. « Je n’ai qu’une envie, c’est de partir et de revoir mon père et ma mère ». Les femmes sont, elles, victimes de viols. L’État malais, comme les propriétaires de plantations, contestent ces faits, parlent de cas isolés, et assurent protéger les droits des ouvrierEs agricoles.
AP rappelle que la plupart des grandes marques, Nestlé, Unilever, Procter & Gamble, se fournissent en huile de palme dans la région. AP souligne également le rôle des grandes banques internationales, Deutsche Bank, BNY Mellon, Citigroup ou HSBC qui soutiennent cette activité.
Les conditions de production de l’huile de palme ne sont en fait qu’une des pires illustrations de ce que dénonçait Marx dans le Capital comme inhérent à la production capitaliste : le fait qu’elle « épuise en même temps les deux sources d’où jaillit toute richesse : la terre et le travailleur ».
Publié sur le site de L’Anticapitaliste.