Le sociologue Daniel Veron vient de publier un livre intitulé Le travail migrant, l’autre délocalisation (La Dispute, 2024). Il sera de passage en Belgique les 17 et 18 avril à Bruxelles et Mons respectivement.

Les politiques anti-immigration s’accumulent et se durcissent en plusieurs points du monde, portées soit par une extrême droite qui gagne de plus en plus de terrain, soit par un extrême centre qui s’aligne sur ses positions racistes et xénophobes. Dans le même temps, les économies capitalistes ne peuvent pourtant se passer du travail migrant, que ce soit pour accomplir des tâches dont les nationaux ne veulent pas (dans des secteurs comme la construction, l’horeca, le nettoyage ou le travail à domicile), mais également parce que les populations migrantes constituent une main d’œuvre docile et bon marché. L’Italie gouvernée par l’extrême droite de Giorgia Meloni, par exemple, illustre bien cette double tendance, en durcissant sa politique d’accueil tout en ouvrant de nouveaux titres de séjour pour les travailleur·euses étranger·ères afin de soutenir l’économie italienne.

À partir d’un travail de terrain de plusieurs années, en France, en Argentine et au Canada, Daniel Veron explore cette contradiction, qui n’est qu’apparente, et indique en quoi les politiques qui s’attaquent aux personnes migrantes ont précisément pour effet de les rendre indispensables à l’accumulation du capital. Le travail migrant, l’autre délocalisation montre comment le statut de séjour précaire des populations migrantes rend celles-ci davantage soumises à la volonté d’un employeur et favorise leur sur-exploitation. L’auteur illustre ainsi comment les classes dominantes construisent la vulnérabilité sociale et juridique de certaines populations pour s’approprier une part plus importante de leur force de travail, éclairant l’articulation entre le capitalisme et les politiques racistes et anti-immigration qui émaillent l’histoire des sociétés modernes.

La force de l’ouvrage, c’est également de montrer que face à cette domination internationale et institutionnalisée, les migrant·es ne sont pas de simples victimes passives, mais développent également des stratégies de résistance, individuelles et collectives. À travers le refus de certaines conditions de travail, ou en rejoignant des syndicats disposés à défendre leurs droits (1)On pense en Belgique à la Ligue des Travailleuses domestiques sans papier de la CSC Bruxelles, qui soutient et organise la lutte de ces travailleuses, isolées par leur travail et vulnérables en raison d’un statut de séjour précaire ; ou encore à la campagne de la FGTB contre le dumping social à travers le recours au travailleur·euses « détaché·es », les personnes migrantes développent des subjectivités de lutte et prennent activement part à leur libération. L’ouvrage de Daniel Veron constitue ainsi non seulement une importante contribution théorique pour éclairer les articulations entre l’exploitation économique et la domination juridique et légale des populations migrantes, mais rappelle également l’urgence pour les forces de gauche de soutenir et rejoindre les luttes des travailleur·euses migrant·es en faveur d’une politique d’accueil juste et non-discriminatoire.

Rencontres avec Daniel Veron

La Formation Léon Lesoil organise prochainement deux rencontres-débat avec Daniel Veron, autour de son ouvrage Le travail migrant, l’autre délocalisation. Rendez-vous le 17 avril à 19h30 à Bruxelles (en collaboration avec la Gauche anticapitaliste), au Pianofabriek (Rue du Fort, 35, 1060 Saint-Gilles (Bruxelles); et le 18 avril à Mons (en collaboration avec le CEPAG Mons-Borinage), Salle Janssens (25 rue de Dinant à 7000 Mons)

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