Samedi 17 février 2024, à l’occasion des 5 ans du Front Antifasciste de Liège 2.0 (FAL), des collectifs antifascistes de toute la Belgique (dont la Gauche anticapitaliste) et d’ailleurs se sont réunis dans la Cité Ardente. À la veille d’élections qui renouvelleront tous les niveaux de pouvoir, ils souhaitent se coordonner pour lutter ensemble contre la montée de l’extrême droite, en Europe comme en Belgique. Ils pointent les dangers spécifiques à la situation belge et proposent un agenda de mobilisation.

Il y a 5 ans, le 30 janvier 2019, plus de 250 personnes et une quarantaine d’organisations (syndicats, associations petites et grandes, collectifs affinitaires, troupes de théâtre, organisations de jeunesse, …) actaient la création du Front Antifasciste de Liège 2.0 (FAL) au Manège de la Caserne Fonck. Il s’agissait de réagir à l’extrême droitisation du champ politique en créant « un front regroupant le plus largement possible toutes les sensibilités de l’antifascisme sans jugement de valeurs sur les méthodes ou les degrés d’engagements mais ayant un objectif clair et précis : la lutte contre les propos, idées, actions de personnes ou de groupement d’extrême droite. »

À peine créé, le FAL avait mené sa première action en empêchant un meeting d’extrême droite de se tenir à Verviers sous le couvert d’une « conférence littéraire » du secrétaire d’État à la migration Theo Francken.

Aujourd’hui, à la veille d’une séquence électorale capitale qui verra tous les niveaux de pouvoir en Belgique être renouvelés, le temps est venu de tirer un bilan et de se rassembler pour contrer la montée du fascisme.

En Belgique francophone, l’extrême droite n’a plus d’élus, à l’exception de quelques cas isolés au niveau communal. Son implosion, suite à la dernière déroute électorale, offre aujourd’hui un paysage atomisé même si un nouveau venu tente de s’imposer, soutenu par de nombreuses structures de l’extrême droite européenne. Les différentes initiatives antifascistes ont participé à maintenir ce nouveau parti à l’état groupusculaire (notamment en empêchant chacun de ses événements publics), mais il surinvestit sa communication sur les réseaux dits sociaux et certains médias peu regardant lui font des coups de projecteur qui seront peut-être lourds de conséquence demain.

Le contraste est saisissant avec la Flandre, où le Vlaams Belang jouit d’une immense popularité. Lors du dernier sondage par exemple, le VB était le plus grand parti avec 27% des intentions de vote. À titre de comparaison, le Vlaams Blok avait obtenu 6,6% des voix lors du dimanche noir de 1991. Parallèlement à cette extrême-droitisation, on assiste également à une normalisation du discours d’extrême-droite. Celui-ci se manifeste, entre autres, par l’adoption d’un langage et de points de vue d’extrême droite par des politiciens et des faiseurs d’opinion de diverses tendances politiques.

L’enjeu de 2024 est triple : maintenir l’absence d’élus d’extrême droite en Belgique francophone et tout faire pour empêcher une vague noire en Flandre, mais aussi combattre l’extrême droitisation des partis « traditionnels », à commencer par le MR qui reprend de plus en plus de thématiques et d’éléments de langage de l’extrême droite. Il n’est malheureusement pas le seul.

C’est pour répondre à ce triple enjeux que le samedi 17 février 2024, une coordination antifasciste de Belgique, regroupant les trois régions (Wallonie, Bruxelles, Flandres), a été lancée. Celle-ci a été inaugurée à l’occasion de l’anniversaire des 5 ans du Front Antifasciste de Liège 2.0, au cours duquel des stands, ateliers, conférences et concerts ont été organisés et qui a également rassemblé des antifascistes de régions limitrophes (Allemagne, France, Pays-Bas).

Venant de partout en Belgique, des participant·es de différents groupes antifascistes et de différentes sensibilités ont ainsi acté la relance d’une coordination antifasciste interrégionale dans un geste à la dimension politique évidente. Ce n’était plus arrivé depuis 30 ans en Belgique. Au-delà d’un lieu d’échange d’informations et de discussions sur les stratégies à adopter pour contrer la montée du fascisme, cette nouvelle coordination entend aussi occuper l’espace public et pousser les différentes forces sociales à se mobiliser.

Cette coordination antifasciste de Belgique déclare que combattre le fascisme, c’est combattre aussi le racisme, sous toutes ses formes. C’est combattre le capitalisme, et l’oppression des corps et des esprits qu’il insinue et les divisions qu’il distille pour se maintenir en place. C’est combattre le système patriarcal et toutes les oppressions liées aux genres.

C’est pourquoi elle invite dès à présent toutes les organisations et personnes favorables à une société ouverte et inclusive basée sur l’égalité sociale, s’opposant donc aux idées d’extrême droite et à ceux qui les propagent, à rejoindre les actions qui seront menées cette année :

  • Le 8 mars : appel à renforcer les différentes actions et grèves qui se tiendront lors de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes ;
  • Le 24 mars : appel à former un bloc antifasciste dans la manifestation à Bruxelles pour la mobilisation annuelle de la Plateforme contre le racisme ;
  • Le 1er mai : appel à renforcer les discours antifascistes lors des différentes mobilisations ;
  • Mobilisation et présence le 5 mai à Breendonk puis le 8 mai de manière décentralisée dans les actions qui seront menées par la « coalition 8 mai » pour refaire de cette journée un jour férié.

Avant les élections du 9 juin 2024, la coordination compte également organiser diverses mobilisations contre l’extrême droite. Si celle-ci vient à percer aux élections, elle se tiendra prête à appeler les forces antifascistes à descendre dans la rue.

De plus, elle appelle toutes les forces sociales à s’opposer à la propagation des discours et idées d’extrême droite en luttant par tous les moyens légitimes à leurs dispositions. Devant l’incapacité actuelle des partis et médias à jouer ce rôle, nous appelons à la création d’un véritable cordon sanitaire de lutte. Que les groupes qui sèment la haine de l’autre se voient opposer une résistance déterminée et systématique.

Aujourd’hui, plus que jamais, organisons-nous : No Pasarán !


Signataires actuels de la Coordination antifasciste de Belgique (liste ouverte à adhésion) :

Blokbuster
CGSP ALR Bruxelles
Coalition Stand-Up contre l’extrême droite
Collectif antifasciste Namurois
Collectif de Mémoire Coloniale et Lutte contre les Discriminations
écolo j
Étudiant.e.s Gauche en Action
Front antifasciste de Liège 2.0
Front antifasciste montois
Garance asbl
Gauche anticapitaliste
Groupe Syndical Antifasciste CEPAG-FGTB Bruxelles
Jeunes CSC Bruxelles
Jeunes FGTB
JOC
Mons Antifa
MOC Bruxelles
MRAX
Parti Socialiste de Lutte
Platform Antifascistische Activisten Leuven
Réseau ADES
RésistanceS & Les Amis de RésistanceS
Union Syndicale Étudiante

Photo : Manifestation antifasciste à Bruxelles, le 29 mai 2023. (Dominique Botte / Gauche anticapitaliste / CC BY-NC-SA 4.0)