Chaque année, la commémoration du massacre étudiant de l’université Polytechnique d’Athènes, où les militaires de la junte militaire fasciste (1967 – 73) massacrèrent plusieurs dizaines d’étudiantEs (le nombre exact n’est toujours pas établi) donne lieu à des mobilisations importantes de la jeunesse scolarisée, autour des mots d’ordre toujours d’actualité : « éducation, pain, liberté ». Les jours qui précèdent la manif du 17 novembre donnent lieu à des meetings, des fêtes de solidarité, des manifs de toute sorte, dans un contexte de résistance anti-impérialiste et de défense des droits démocratiques.

Pluies d’attaques antisociales

Cette année, les mobilisations étudiantes ont commencé très tôt. Dès son arrivée au pouvoir début juillet, la droite du rejeton de la vieille famille Mitsotakis a annoncé la couleur : économies sur l’éducation publique, feu vert au privé, le tout sur fond de campagne hystérique de répression des droits, contre les réfugiéEs, contre les travailleurEs, contre la gauche en général, et cela en s’appuyant sur son aile fascisante (cadres de la droite provenant d’anciens groupuscules fascistes) et sur les médias quasi entièrement aux ordres, la 1ère chaine française TF 1 apparaissant presque de gauche face aux chaînes grecques ! 

Dans le secteur éducatif, la nomination d’une bigote fondamentaliste comme ministre, Niki Kerameos, a été suivie de mesures toutes plus antisociales et anti-démocratiques les unes que les autres : fermeture de la fac de droit de Patras, ouverte par le gouvernement Syriza, et de 37 autres sections universitaires, limitation du droit aux études (viré après deux échecs), projet de casser le monopole public de l’université (pour l’instant, les boites privées du supérieur, hyper chères, sont en lien avec des facs étrangères qui les patronnent… et en tirent des revenus), nomination récente comme président de l’Institut de politique éducative d’un provocateur réactionnaire… Et pour faire passer ces attaques sociales de premier plan, la droite a voté cet été une mesure répressive très inquiétante, qui pour beaucoup montre clairement le lien entre cette droite « orbanisée » et la junte militaire des années 1967-73 : la suppression de l’asile universitaire, bien sûr entourée de tout un fatras d’élucubrations accusatrices sur les refuges terroristes dans les facs, les terroristes étant, en vrac, les anars, l’extrême gauche et Syriza! 

Mobilisations étudiantes

Le mouvement étudiant ne s’est pas trompé sur la gravité de cette mesure et ses conséquences non dites sur le droit aux études : dès fin juillet, une première manif voyait défiler 5000 étudiantEs à Athènes. Et depuis la rentrée, de nombreuses mobilisations ont eu lieu sur cette question, avec ces dernières semaines de belles manifs et une mobilisation croissante avec comme perspective le 46e anniversaire de Polytechnique, dont beaucoup ont compris le fort enjeu cette année. Du coup, les instances universitaires se mettent au garde-à-vous : conférence des présidents d’université dénonçant les « épisodes » de violence… étudiante et, surtout, décision inouïe de la direction d’ASOEE, fac d’économie d’Athènes, de fermer la fac dans la semaine du 17 novembre, empêchant sa communauté universitaire d’organiser ce qui est un moment important de la vie universitaire et de la politisation. Les étudiantEs de cette fac et d’autres ont organisé une riposte à ce lock-out, entrant dans leur fac pour faire valoir leurs droits. Résultat : une violente intervention policière contre les étudiantEs mais aussi contre des passantEs, des journalistes (tenus à l’écart…), Mitsotakis montrant ainsi à tous ceux et toutes celles qui en doutaient son vrai visage. 

« La loi et l’ordre »

Car le slogan de la période pour le pouvoir, c’est « la loi et l’ordre », ce qui n’est pas sans rappeler en Grèce des slogans d’époques bien sombres. Cela s’illustre évidemment par les expulsions des immeubles occupés, notamment dans le quartier d’Exarcheia sinistrement quadrillé par les MAT (CRS), et qui continuent sans que s’y oppose une protestation suffisamment massive. Cela se vérifie aussi avec les droits que s’octroie une police dont on sait à quel point elle est gangrenée par les idées nazies de Chryssi Avgi (Aube dorée) : arrestations  arbitraires, passages à tabac, humiliations diverses, menaces, et déclarations provocatrices de flics se réjouissant que l’esprit de la junte soit revenu… 

Alors, bien sûr, tant de provocations et d’impunité font penser à certains que le gouvernement tente d’ouvrir un autre front pour faire oublier le scandale financier dans lequel sont salement englués certains de ses membres, dont le ministre d’extrême droite Georgiadis. Que cet aspect existe, c’est possible. Mais il est évident que sur le fond, ce gouvernement revanchard et sans grande expérience n’a qu’un but : le libéralisme intégral, à la Pinochet comme on le dit ici, et notamment dans le domaine éducatif, avec comme projet de restreindre très fortement le droit aux études. 

Ces attaques, le mouvement étudiant les refuse de plus en plus fort ces derniers jours : le jeudi 14 novembre, une très grosse manif a eu lieu dans le centre d’Athènes, et de nombreuses facs sont occupées dans le pays, en vue d’un 17 novembre auquel la jeunesse compte bien donner un caractère bien plus massif que les années précédentes. Toutes raisons pour lesquelles le lien avec le mouvement ouvrier sera décisif… ainsi que la solidarité internationale, notamment contre la répression !


PS (18 novembre) : La commémoration de l’École Polytechnique, le 17 novembre, a été plutôt une bonne et encourageante surprise : des dizaines de milliers de manifestantEs (la police parle de 20 000…), avec des cortèges combattifs. La présence des étudiantEs et de la jeunesse plus largement confirme qu’une reconstruction de la résistance face aux attaques brutales de la droite se prépare…

Publié sur le site du NPA.