Rajoy à Rivera (Ciudadanos) : “La bonne nouvelle c’est que cela nous fait tous marrer par ici que tu sois un Catalan catalanophobe. La mauvaise nouvelle c’est que tu es un catalanophobe… mais Catalan !”

  1. Ces derniers jours, après la suspension, par le Président de la Généralité, Carles Puigdemont, de la déclaration d’indépendance, le gouvernement espagnol, appuyé par le PSOE et Ciudadanos (et avec le soutien de tous les grands médias du régime) met le pied au plancher pour aller vers l’application de l’article 155 [article de la Constitution qui permet de suspendre le gouvernement d’une région autonome] et la mise en oeuvre d’autres mesures d’exception.

    De leur côté, de grandes entreprises et de grandes banques ayant leur siège social en Catalogne, l’ont transféré à l’extérieur dans le but de semer de l’instabilité et d’exercer une évidente pression politique. Cette dynamique politique et économique a deux objectifs : d’une part, l’affaiblissement et la défaite du mouvement indépendantiste catalan et, de l’autre, la destruction, dans le reste de l’Etat espagnol, de la contestation des élites par ceux et celles d’en bas, et cela par la construction d’un consensus autour de l’identité espagnole avec la volonté de résoudre ainsi la crise de régime que nous connaissons ces derniers temps. C’est là une opération politique visant à refermer le cycle des revendications en faveur de la récupération des droits perdus combinées à la contestation des privilèges des élites économiques et politiques.

    De ce point de vue, la mise en application de l’article 155, prévue dans les prochains jours, signifierait que s’enclenche une escalade répressive qui, tout en approfondissant la démarche autoritaire et d’atteinte aux libertés engagée, n’apporterait aucune solution démocratique à la Catalogne. La légitimité du référendum du 1er octobre a, en effet, à nouveau, remis sur la table la seule possibilité de sortir du conflit politique existant en Catalogne, la libre décision du peuple catalan.

    Il va être incontournable, dans les prochains jours, de s’opposer activement à la mise en place de l’article 155 et à toutes les mesures répressives visant les forces favorables à la souveraineté catalane. Nous considérons, en même temps, que la défense de l’auto-gouvernement et de cette souveraineté de la Catalogne ainsi que des droits civils passe, à la fois, par le départ immédiat hors du territoire catalan de la Police Nationale et de la Garde Civile et par la dénonciation de l’utilisation arbitraire de ces corps répressifs qu’a faite le gouvernement pour régler des problèmes politiques. Et cela alors qu’ailleurs, dans le pays, les autorités politiques permettaient que les actions de l’extrême droite aient lieu en toute impunité comme cela s’est vu à Saragosse et à Valence.

  2. L’accord entre le PP et le PSOE pour l’application de l’article 155 a été présenté comme le premier volet d’une démarche dont le volet complémentaire serait une réforme constitutionnelle qui, en réalité, se réduit à la création d’une Commission d’Etude. Cette réforme recouvre une tentative du régime, et des principaux partis qui lui sont associés, de résoudre par le haut la crise territoriale que traverse l’Etat espagnol. Tentative, en somme, pour faire que rien ne change sur le fond mais qui se donne un objectif clair : renforcer le régime en entraînant le PSOE vers une unité basée sur une réactualisation des consensus constitutionnels. Cette résolution de la crise par le haut qui s’opère en prenant appui sur la nouvelle vague de nationalisme espagnol, va essayer de recomposer le champ politique et de mettre fin à la crise de l’Etat en Catalogne ainsi qu’à la crise de régime qui a éclaté en mai 2011 [mouvement des Indigné-es] quand des millions de personnes sont sorties dans la rue pour crier « nous ne sommes pas des marchandises entre les mains des politiciens et des banquiers ».

    Le rôle du PSOE de Pedro Sánchez est, à ce titre, révélateur : alors que son élection comme Secrétaire Général avait soulevé, dans certains secteurs de la population, de l’espoir, nous faisons le constat de la véritable nature de son projet et de ses limites sur le terrain de l’alternative politique. Le PSOE de Pedro Sánchez se situe toujours à l’endroit où il a été ces dernières décennies : du côté des consensus d’Etat, du nationalisme espagnol et de son engagement au sein du Régime de 78 [1978, date du référendum constitutionnel qui, apothéose d’une Transition pilotée par des franquistes « reconvertis démocrates », instaure l’actuelle monarchie parlementaire] où le Roi est devenu le porte-parole de l’aile dure du PP.

    Voilà pourquoi, devant cette opération de maquillage en cours qu’induit la « réforme constitutionnelle », nous devons toujours insister sur l’idée que des républiques et des processus constituants sont une alternative stratégique pour les classes populaires.

  3. Nous assistons en ce moment à une claire résurgence de la violence et des apparitions de l’extrême droite. Il s’agit d’une extrême droite qui agit depuis divers espaces, partis et organisations et sur le mode open bar pour l’impunité.

    La responsabilité du PP et des médias dans cette situation est évidente : ils couvrent que ces groupes puissent agir en tant que troupes de choc pour favoriser la haine, la tension et la violence avec, l’objectif clair de prendre la rue. Face à l’augmentation des actions de ces organisations, nous, forces de gauche et mouvements sociaux, avons une tâche fondamentale de dénonciation et de mobilisation à mener pour éviter cette escalade et empêcher le développement du fascisme dans nos villes.

Anticapitalistas, 14 octobre 2017