Nous sommes toutes et tous fortement ébranlé-e-s par la crise sanitaire due à la pandémie du Coronavirus. Les personnes touchées directement par la maladie et qui s’en sont sorties ont souvent témoigné de la rudesse de celle-ci. Un bon nombre d’entre elles ne seront totalement guéries qu’après une longue période de revalidation. Le Corona a tué jusqu’à présent plus de neuf mille personnes, dont la moitié était hébergée dans les homes pour personnes âgées. Cette crise a cruellement mis en lumière les dégâts que les politiques d’austérité ont causés dans nos hôpitaux.

Tout à coup, nous nous sommes aperçu-e-s que la prise en charge de nos ainé-e-s constituait un marché accaparé à plus de 50% par des groupes privés qui ont comme motivation première le profit au détriment de la qualité de la prise en charge de nos parents ou grands-parents. Les personnels soignants et techniques de nos hôpitaux et de nos homes ont payé un lourd tribu à cette crise. Dans ces institutions, des travailleuses et des travailleurs ont perdu la vie dans ce combat contre la maladie. Mais, à des degrés divers, c’est toute la population qui est impactée par cette crise sanitaire qui d’emblée s’est couplée avec une aggravation d’une crise économique et sociale qui était déjà préoccupante avant l’arrivée du Coronavirus. Dans cet article, nous nous attacherons à analyser quelles sont les conséquences de ce fléau sanitaire sur les travailleuses et les travailleurs les plus précaires, que celles-ci et ceux-ci soient belges ou étrangers, avec ou sans-papiers.

Le chômage temporaire, une garantie contre les licenciements ?

Selon le journal Le Soir « Plus d’un million de travailleurs/euses ont été mis en chômage temporaire. Soit 30% des effectifs salariés, hors administrations publiques et éducation » Si beaucoup de personnes affirment que cette mesure permet d’éviter, pour l’instant, des licenciements pour celles et ceux qui en bénéficient, par contre, elles provoquent une perte importante de revenus. En effet, durant la ou les périodes de chômage temporaire, les travailleurs/euses ne perçoivent plus que 70% de leur salaire. Il ne faut pas sous-estimer l’impact de cette perte de pouvoir d’achat, notamment pour celles et ceux qui ont des crédits en cours ou qui sont endetté-e-s.

Si des mesures ont été prises pour reporter le remboursement de crédits ou de dettes, notons que les cabinets d’huissiers sont montés au créneau pour faire valoir que cela ne pouvait pas durer trop longtemps, tout particulièrement pour ce qui concerne les sommes dues par des particuliers à leurs créanciers. On notera le caractère de classe de cette prise de position de la part des huissiers prompts à protéger les entreprises mais sans aucune pitié pour les travailleuses et les travailleurs. Des centaines de milliers de personnes se trouvent donc dans une situation financière préoccupante.

Une fois de plus, leur protection repose essentiellement sur la solidarité de la collectivité. Le gouvernement n’a pas sollicité le patronat pour assurer à toutes ces travailleuses et travailleurs de garder cent pour cent de leur salaire. Il aurait dû le faire. Après tout, cela n’aurait été qu’un petit rattrapage, eu égard aux centaines de milliards d’euros d’exonération de cotisations à la Sécurité Sociale consentis par nos différents gouvernements aux entreprises et à leurs actionnaires depuis plus de trente ans. Surtout, cela aurait évité à de nombreuses travailleuses et de nombreux travailleurs de se retrouver dans une situation financière difficile avec ce que tout cela comporte comme conséquences.

Aujourd’hui, certain-e-s ont repris le travail. Parfois, avec des semaines amputées de jours chômés. Les mesures de protection sanitaire sont loin d’être toutes appliquées comme elles devraient l’être. Dans certains lieux de travail, la distanciation physique n’est pas possible tout le temps. Aux angoisses liées à la perte de revenus et à celles relatives à une protection sanitaire défaillante, viennent s’ajouter beaucoup de doutes sur l’avenir de la garantie d’emploi. Si le chômage temporaire a évité dans ce premier temps de crise des licenciements massifs, il n’est pas dit qu’il en sera comme ça dans les semaines à venir. Les restructurations avec licenciements annoncés dans l’aéronautique en sont la preuve.

Dans les semaines qui viennent, Il faudra bien d’autres mesures que le chômage temporaire pour garantir l’emploi des travailleuses et des travailleurs. Nous ne pourrons plus nous contenter de négocier les plans sociaux. Nous devrons mener des luttes pour défendre l’emploi en avançant des revendications adéquates. Si des entreprises de l’aéronautique veulent restructurer, n’acceptons aucune perte d’emploi. Imposons un plan de reconversion des travailleuses et des travailleurs dans des activités socialement et écologiquement utiles. Il y a tant à faire par exemple pour, dans le cadre du service public, développer la mobilité douce et renforcer les transports en commun non polluants. Les multinationales qui nous licencient ont des centaines de milliards d’euros en réserve.

« Certains groupes qui annoncent des milliers de licenciements à cause du COVID19 ont encore plus de profits en stock ! Dans la situation actuelle l’État doit les contraindre à utiliser ces moyens pour que nos activités se poursuivent ou reprennent et empêcher nos licenciements »

CGT Goodyear – pétition « Le jour d’après… »

Des milliers de contrats intérimaires et en CDD non renouvelés

Les activités culturelles sont presque toutes à l’arrêt. Beaucoup d’artistes et de personnes travaillant dans le secteur culturel et qui étaient engagés à la prestation, n’ont aucune protection. Celles et ceux qui ont le statut d’artiste perçoivent des allocations de chômage proches ou en dessous du seuil de pauvreté. Sans un soutien important des pouvoirs publics, les salarié-e-s de troupes de théâtre et d’institutions du monde de la culture risquent de perdre leur travail si l’inactivité forcée se prolonge(1)La Gauche anticapitaliste reviendra sur ce sujet prochainement.

Mais, dans tous les secteurs d’activité, un nombre très important de travailleuses et de travailleurs en contrats précaires (CDD et intérimaires) ont été purement et simplement remercié-e-s. Même celles et ceux à qui les employeurs avaient promis des renouvellements de contrats sur plusieurs mois. Pour toutes celles-là et ceux-là, pas de chômage temporaire, il n’y a que trois perspectives : les allocations de chômage ou d’insertion au cas où l’accès à ces droits sont possibles ; une demande d’ouverture d’un Revenu d’Intégration Sociale au CPAS ; se retrouver carrément sans possibilité de revenu personnel si par exemple on est considéré ou considérée comme cohabitante ou cohabitant-e n’ayant pas droit au Revenu d’Intégration Sociale.

Des patrons publics ou privés n’ont pas hésité à se séparer de ces travailleuses et travailleurs même si celles-ci et ceux-ci étaient déjà occupé-e-s depuis longtemps dans leurs entreprises. Beaucoup de jeunes ont été impacté-e-s par ces licenciements. Cela prouve à quel point la précarisation du marché du travail fragilise la protection des travailleuses et des travailleurs. Elle donne tout pouvoir au patronat public et privé pour surexploiter les salarié-e-s en contrats précaires quand ils en ont besoin. Elle leur permet de les jeter comme des kleenex quand ils ne leur sont plus utiles. Or, dans cette période incertaine, les organisations patronales annoncent déjà leur intention de réaliser leurs futures embauches par le biais de contrats intérimaires et de CDD. Il faut empêcher cette précarisation accrue du marché de l’emploi en luttant pour obtenir la réduction collective du temps de travail avec embauches compensatoires et sans pertes de salaire. Pour nous, la règle doit être d’engager dans des contrats de travail à durée indéterminée et à temps plein avec une juste rémunération.

Les chômeuses, les chômeurs et les allocataires d’insertion sont restés sous pression 

« Depuis le 13 mars 2020, le FOREM a suspendu les rendez-vous dans ses bureaux… Les rendez-vous et les activités à distance restent la priorité… En fonction de votre situation, les évaluateurs du FOREM prendront si nécessaire contact avec vous pour organiser un rendez-vous soit à distance, soit dans nos bureaux. Dans ce cadre, si vous recevez une convocation à un entretien d’évaluation, vous devez vous y présenter ou y répondre s’il s’agit d’un entretien téléphonique… Les éléments se reportant à la période allant du 13 mars au 17 mai 2020 ne pourront pas avoir de conséquences négatives sur l’évaluation globale de votre recherche d’emploi. Tout élément positif sera pris en considération… Nous vous invitons néanmoins à consulter les offres d’emploi et à poser votre candidature auprès des entreprises. Nombre d’entre elles restent en demande de talents pour la reprise des activités… »

Extrait de la FAQ COVID19 mise à jour le 12 mai 2020 sur le site du FOREM

Nous pensions que tout entretien de contrôle concernant la disponibilité des chômeuses et chômeurs avait été, jusqu’à nouvel ordre, bloqué. En regardant de plus près le site du FOREM, on s’aperçoit que la grave crise sanitaire que nous vivons encore, n’empêche pas celui-ci de continuer à faire pression sur les sans-emploi en allocations de chômage ou en allocations d’insertion. En fait, les évaluateurs/rices du FOREM ne pourront pas prendre en considération négativement la période qui va du 13 mars au 17 mai 2020. Mais pas question de ne pas répondre à une convocation à un entretien d’évaluation même si nous ne sommes encore qu’au début d’un déconfinement à haut risque… et finalement, comme certains employeurs au cours de cette crise sanitaire sont en manque de personnel, le FOREM, en grand complice du patronat, presse les sans-emploi à postuler… Mais pour quels types de contrats de travail ? Ces dernières années, nous avons bien remarqué qu’ils étaient de plus en plus précaires.

Depuis le 18 mai, le FOREM effectue à nouveau un nombre limité de démarches spécifiques en présentiel, uniquement les démarches qui nécessitent un contact en vis-à-vis. C’est justement le cas pour les entretiens de contrôle de la disponibilité. Il y a fort à parier que dans les jours qui viennent, ces contrôles qui peuvent aboutir à des sanctions temporaires de trois mois ou à des exclusions vont reprendre. Pas de relâche de la pression pour que les patrons puissent bénéficier d’une main d’œuvre dans les conditions dans lesquelles il voudra bien la faire travailler. Et tant pis si ces entretiens aboutissent à des exclusions de personnes qui n’auront plus qu’à aller frapper à la porte des CPAS ou à celle des banques alimentaires. Ce qui est certainement déjà le cas pour les chômeuses et chômeurs qui ont des allocations en dessous du seuil de pauvreté.

La dégressivité des allocations de chômage a été quant à elle bien gelée du 1er avril au 30 juin 2020. Mais cette mesure est loin d’aider toutes les personnes en allocations de chômage. Celles qui avaient déjà subi une dégressivité ou deux et étaient déjà passées en seconde ou en troisième période avant la fin mars doivent quand même traverser cette crise sanitaire et les augmentations des prix sur les produits essentiels avec un pouvoir d’achat très diminué. Quant à celles qui sont en première période et qui pourront y rester jusqu’au 30 juin, elles ne perçoivent que 65% de leur dernier salaire brut, ce qui est déjà une amputation très importante de leurs revenus. Les personnes qui subissent actuellement des licenciements et qui ne bénéficient pas du chômage temporaire sont obligées de vivre dans ces conditions et subiront à partir du 1er juillet les règles établies en matière de dégressivité des allocations de chômage avec la perspective de pertes de pouvoir d’achat encore plus importantes.

Les personnes en allocations d’insertion qui arrivaient en fin de droit le 31 mars, ont vu leur allocation prolongée du 1er avril jusqu’au 30 septembre 2020. Un très court répit de quelques mois avant de devoir aller frapper à la porte des CPAS ou de perdre toute possibilité d’avoir des revenus personnels. Ces allocataires d’insertion, c’est-à-dire en partie, celles et ceux qui ont eu le plus de mal à intégrer le marché du travail, qui ont très peu ou jamais travaillé, n’échapperont pas au couperet de l’exclusion à partir du 1er octobre 2020.

Si certain-e-s travailleuses et travailleurs ont pu bénéficier des mesures de chômage temporaire, les sans-emploi dont les formations ont été stoppées n’ont bénéficié d’aucune compensation. Leur incitant financier d’1 € brut de l’heure a été supprimé purement et simplement. Or, nous savons que ce tout petit revenu complémentaire compte énormément pour ces personnes qui galèrent tous les jours pour s’en sortir. Nous trouvons déjà scandaleux que cet incitant n’ait jamais été augmenté. Nous savons de par les actions de solidarité que nous avons organisées, que celles-là et ceux-là sont venu-e-s grossir les files à l’entrée des banques alimentaires.

Avant la crise sanitaire, un Belge sur cinq était déjà concerné par la pauvreté. « 15,5% de notre population était considérée comme étant en risque de pauvreté. Ce sont les 18-24 ans (20,8%), les chômeuses et chômeurs (45,9%), les familles monoparentales (41,4%), les personnes qui ont été peu scolarisées (30,7%), les locataires (36,2%) qui sont les plus exposé-e-s. »(2)socialsecurity.belgium.be

Selon le journal Le Soir, « 1/5 des chômeurs temporaires pourraient être licenciés, soit 180.000 travailleurs. Cela constituerait 2/5 du stock des demandeurs d’emplois inoccupés ». La Wallonie pourrait compter jusqu’à 50.000 chômeuses et chômeurs en plus. Si nous devons mener une bataille pour la défense de l’emploi, nous devrons en mener une aussi pour renforcer la Sécurité Sociale. Tout d’abord en revendiquant le retrait de toutes les mesures d’activation répressives introduites dans celle-ci et qui ont exclu des dizaines de milliers de personnes d’une protection pour laquelle nous avons toutes et tous cotisé. Toutes ces décisions dites d’activation destinées à faire pression sur les personnes sans-emploi pour qu’elles acceptent n’importe quel boulot dans n’importe quelles conditions n’ont fait que profiter aux patrons et aux multinationales. En parallèle, ces derniers, depuis plus de trente ans, ont bénéficié de plusieurs centaines de milliards d’euros de réduction de cotisations sociales, ce qui constitue la cause principale du sous-financement de la Sécurité Sociale au nom duquel, on nous a imposé la fin des prépensions et l’allongement de l’âge de la pension à 67 ans à partir de 2027. Il faudra donc que les gros actionnaires capitalistes nous rendent cet argent afin que la Sécurité Sociale puisse à nouveau jouer son rôle primordial de rempart contre la précarité et la pauvreté.

La Fédération des CPAS prend position pour le versement d’un complément d’allocations, mais… elle oublie les personnes sans-papiers !

La fédération des CPAS avait demandé au gouvernement fédéral que tous les allocataires sociaux puissent percevoir un complément d’allocations pendant toute la durée du confinement. Celui-ci serait renouvelé automatiquement tous les mois. En fin de communiqué, elle prévient : « Afin d’éviter une crise sociale d’une ampleur trop importante, nous plaidons avec force pour l’élaboration d’un nouveau contrat social » par lequel « aucun revenu ne peut plus se situer en-dessous du seuil de pauvreté »

Dommage que la Fédération des CPAS, dans son communiqué, ait oublié les personnes sans-papiers. Pourtant beaucoup de villes et communes se sont déclarées hospitalières par rapport aux personnes migrantes. De plus, la coordination des sans-papiers de Belgique s’est adressée de manière explicite aux villes et à leurs CPAS pour que ceux-ci soutiennent la revendication de la régularisation immédiate des sans-papiers. Comme toutes les autres personnes précaires, les sans-papiers méritent le soutien des CPAS. Il est plus que temps que ceux-ci expriment leur solidarité politique et sociale en faveur d’une population dont la vulnérabilité a encore augmenté dans le cadre de la crise sanitaire.

Pour le reste, cela fait longtemps que de nombreuses associations disent que plus aucun revenu ne doit se situer en dessous du seuil de pauvreté. Mais il faut préciser les choses. Que veut dire contrat social ? Si cela signifie un droit au revenu individuel le plus inconditionnel possible au-dessus du seuil de pauvreté, nous sommes preneurs. Mais alors, pour que chaque personne puisse percevoir un tel revenu, il faudra commencer par supprimer le statut cohabitant de nos législations sociales. Ce qui, du même coup, rendra inutile les contrôles humiliants réalisés au domicile des bénéficiaires d’aide sociale pratiqués par certains CPAS et qui se sont même poursuivis pendant la crise sanitaire !

Ensuite, si on veut vraiment que chaque personne soit assurée en permanence de percevoir un revenu au-dessus du seuil de pauvreté, nous plaidons (comme pour la Sécu) pour le retrait de toutes les mesures qui peuvent conduire à des exclusions dans l’aide sociale. Il y en a des multiples mais nous sommes en tout cas pour la suppression des PIIS (Projet Individualisé d’Intégration Sociale) que presque toute personne en Revenu d’Intégration Sociale doit signer et qui peut conduire à des exclusions temporaires.

Il faudrait aussi que la fédération des CPAS balaye devant sa porte. Quand des CPAS excluent des personnes au motif que soi-disant elles cohabitent (alors qu’au sens même de la loi elles ne sont pas cohabitantes), ils plongent également des gens dans la plus grande détresse puisqu’ils les privent du dernier filet de protection sociale et souvent de façon complètement illégale.

D’accord donc pour forcer le gouvernement à augmenter immédiatement l’ensemble des allocations sociales. Mais cette mesure ne doit pas être temporaire et doit prendre la forme d’un droit à un revenu individuel au-dessus du seuil de pauvreté qui soit le plus inconditionnel possible.

« Selon l’administration fédérale de l’Intégration Sociale, le nombre de demandes d’un revenu d’intégration sociale auprès d’un CPAS a augmenté de 10%. Soit plus de 10.000 demandes supplémentaires. Dans le même temps, les demandes d’une aide complémentaire devraient croître de 30%. Ces deux postes cumulés représentent un coût estimé de 34 millions d’euros. » Source journal Le Soir. Avec la Sécurité Sociale, les CPAS constituent le second pilier pour protéger les populations les plus vulnérables. Nous sommes donc pour un refinancement structurel de ceux-ci. Il faut en effet que le secteur de l’aide sociale ait plus de moyens pour aider les personnes en détresse. Mais, si nous sommes prêts à nous battre pour un refinancement à la hauteur des enjeux sociaux qui traversent notre société, ce n’est pas pour autant que nous ne continuerons pas à lutter de manière intransigeante contre toutes les pratiques de contraintes et de contrôle social qui attentent aux libertés individuelles et collectives des personnes en Revenu d’Intégration Sociale. Car c’est avant tout aux côtés de celles-ci que nous sommes.

« Déconfinons la régularisation des sans-papiers… »

Les sans-papiers sont dans les populations les plus vulnérables. Elles n’ont aucun droit à part l’Aide Médicale Urgente. Les seules façons de survivre sont l’aide de la famille ou d’ami-e-s, la solidarité citoyenne ou le travail en noir. Au plus fort de la crise sanitaire, beaucoup de sans-papiers ont perdu leur travail dans les secteurs de la restauration ou de la construction. Des personnes et des familles souvent avec des enfants en bas âge, ont dû vivre le confinement sans aucun revenu. Ceux et celles qui avaient réussi à garder un logement n’arrivent plus à payer leur loyer et il y a un réel danger que certain-e-s se retrouvent sans toit au-dessus de leur tête sauf si leur habitation appartient à des propriétaires qu’ils/elles connaissent et qui veulent bien attendre. Pour les parents sans-papiers, c’est une torture d’être confiné-e-s avec leurs enfants sans jamais pouvoir répondre à leurs demandes.

Au début du confinement, certaines personnes sans-papiers n’osaient pas sortir de chez elles par peur des contrôles policiers. Elles ont tellement intégré le fait de n’avoir aucun droit à part celui de l’Aide Médicale Urgente qu’elles ne font pas de démarches pour demander la solidarité du CPAS de leur commune même si elles sont extrêmement en danger. Il faut dire que dans les communes, les CPAS ne vont pas au-devant de leurs besoins en prenant par exemple contact avec celles connues qui ont accès à l’Aide Médicale Urgente. Heureusement, il y a eu certaines banques alimentaires qui, en lien avec des associations, ont organisé la distribution de colis accessibles aux personnes et familles sans-papiers.

Dans les occupations, à Bruxelles et à Liège, les personnes sans-papiers se débrouillent seules avec l’aide d’associations citoyennes. Elles ont dû auto-organiser leur confinement et leur protection par rapport au virus.

« Alors que la pandémie du COVID-19 continue de faire des ravages dans toutes les couches de la population de notre pays, les personnes sans papiers souffrent doublement de la situation.
Plus de 150.000 hommes, femmes et enfants survivent actuellement sur le territoire sans titre de séjour.
Leur accès aux soins de santé est rendu plus difficile.
C’est toute une frange de la population qui est ainsi mise en danger. Or, nous savons que les mesures de confinement et de sécurité sanitaire ne seront efficaces que si elles sont observées par l’ensemble de la population.

Seul l’octroi de titres de séjour aux personnes sans papiers et la libération des détenus dans les centres fermés seront à même de répondre à ce défi humanitaire et sanitaire… »

Extrait d’une lettre envoyée aux communes par plusieurs associations)

Prendre soin de nous-mêmes et des autres, c’est aussi régulariser les sans-papiers. La Belgique doit le faire maintenant et sans conditions !

Conclusions

La crise sanitaire que nous connaissons a amplifié les dégâts causés par les politiques d’austérité menées sans relâche au cours de différentes législatures par plusieurs gouvernements. Elle nous révèle aussi à quel point le capitalisme est nuisible à la planète, à notre qualité de vie ainsi qu’à notre santé. D’en bas, en nous mobilisant, nous pouvons changer les choses. Pour que nous ne soyons plus considéré-e-s comme des marchandises, pour que toutes et tous, nous puissions bénéficier d’une vie convenable de notre naissance jusqu’à notre mort, pour des soins de santé de qualité accessibles à toutes et à tous, pour des emplois socialement et écologiquement utiles et épanouissants, pour la liberté de circulation et d’installation en toute sécurité, pour une Sécurité Sociale et un système d’aide sociale véritablement protecteurs quand nous subissons des coups durs, il faudra que la collectivité reprenne le contrôle de la société sur les actionnaires capitalistes avides de profit à travers des services publics forts.

Ces services publics forts, nous pourrons les financer en imposant :

  • Un impôt sur les grosses fortunes.
  • Une lutte efficace contre la fraude fiscale qui fait perdre à la collectivité plusieurs dizaines de milliards d’euros chaque année.
  • Un impôt plus progressif et plus juste pour que les détenteurs de capitaux paient leur part à la collectivité

Pour changer la vie, nous devons avoir l’ambition d’orienter nous-mêmes les politiques économiques, écologiques, sociales et migratoires, en obtenant par nos luttes la socialisation des secteurs clés de l’économie et des grandes banques privées.

Nos vies valent plus que leurs profits et il est grand temps que les capitalistes et les partis qui les soutiennent entendent notre aspiration à une meilleure existence.

Freddy Bouchez
Coordinateur de la Marche des Migrant-e-s de la région du Centre
Militant de l’Association de Défense Des Allocataires Sociaux

Notes[+]