Le vendredi 30 mars était organisées, dans les territoires palestiniens, les premières initiatives de la « marche du Retour », initiée par plusieurs associations palestiniennes et soutenue par les factions politiques. À Gaza, des manifestations et rassemblements regroupant des dizaines de milliers de personnes ont été délibérément pris pour cibles par l’armée israélienne. Bilan : 18 mortEs et plus de 1 400 blesséEs. 

Les manifestations organisées le 30 mars dernier, à l’occasion de la célébration de la journée de la Terre (voir l’Anticapitaliste n°423), marquaient la première étape des six semaines d’initiatives de la « marche du Retour ». Celles-ci dureront jusqu’au 15 mai, date anniversaire de la création de l’État d’Israël en 1948 et symbole, pour les PalestinienEs, de la « Nakba », la Catastrophe, au cours de laquelle 800 000 d’entre eux furent expulsés de leur terre.

Réfugié.e.s mobilisé.e.s

Dans la bande de Gaza, ce sont pas moins de 1,3 million de personnes (sur 2 millions d’habitantEs), qui sont officiellement enregistrées comme réfugiéEs. Il n’est donc pas surprenant de constater que la mobilisation du 30 mars, largement préparée en amont avec l’appui des organisations politiques, y compris et notamment le Hamas, ait été un succès quant à la participation. A fortiori lorsque l’on sait que les GazaouiEs subissent depuis plus d’une décennie un blocus inhumain – et illégal – qui a fait de leur vie quotidienne un véritable calvaire : 80% des habitantEs de Gaza dépendent des aides internationales.

Ils et elles étaient donc des dizaines de milliers, répartis sur cinq points de rassemblement, souvent jeunes (plus de 50% de la population de Gaza est âgée de moins de 18 ans), parfois venus en famille, pour protester et revendiquer pacifiquement. Les témoignages et les vidéos diffusées sur les réseaux sociaux sont explicites : à aucun moment l’armée israélienne n’a été victime de menaces justifiant de tirer sur la foule à balles réelles pour se « défendre ».

Tirer pour tuer… la mobilisation

Malgré la propagande de l’état-major et du gouvernement israéliens, il apparaît que ce qui s’est passé à Gaza le 30 mars est une tuerie délibérément préparée, et organisée par Israël. La sanglante répression d’une marche pacifique a des objectifs politiques : dissuader quiconque de participer aux prochaines initiatives du même type, à moins d’être prêt à risquer sa vie ; délégitimer le principe même des mobilisations populaires pour favoriser l’affrontement armé, qui bénéficie d’une légitimité moindre au niveau international et dans lequel l’État d’Israël est ultra-dominant.

La tuerie du 30 mars en rappelle une autre, qui s’était produite le 30 janvier 1972 dans la ville irlandaise de Derry. Confrontés à une mobilisation croissante contre leurs pratiques répressives et discriminatoires en Irlande du Nord, les autorités britanniques avaient fait le choix de réprimer dans le sang une manifestation de masse, pacifique, lors de ce qui est resté dans les mémoires comme le « Bloody Sunday », pariant sur une militarisation et une « dépopularisation » de la lutte. On ne sait pas encore quels seront les suites du Bloody Friday de Gaza, mais une chose est toutefois certaine : le gouvernement et l’état-major israéliens en portent la responsabilité, et ils devront un jour rendre des comptes pour l’ensemble de leurs crimes.

Article publié sur le site du NPA.