Le 15 décembre dernier mourait bell hooks, militante, artiste, poète, écrivaine, philosophe et commentatrice culturelle afro-américaine. Aucune étiquette accolée à l’identité de bell hooks ne suffira jamais à rendre compte de l’immense perte ressentie par nombre d’activistes de par le monde.
Née le 25 septembre 1952 aux États-Unis, hooks n’aura de cesse au cours de sa vie de déconstruire les structures morales, culturelles, économiques et de genre imposées par les systèmes oppressifs tels que le capitalisme, le racisme, l’homophobie et le sexisme.
Militante queer, bell hooks s’est attachée à redéfinir les contours du féminisme à l’encontre du féminisme blanc dominant néolibéral. Ses écrits se concentrent non pas sur une égalité homme-femme qui au final ne bénéficierait qu’aux femmes blanches, bourgeoises et hétérosexuelles et servirait en outre d’excuse à toutes sortes de politiques néocoloniales et impérialistes, mais sur une nécessité de rendre compte de l’imbrication de différents systèmes d’oppression dans la construction des mouvements féministes.
Recentrant les expériences des femmes noires et racisées, sa perspective intersectionnelle a aidé à la formation de mouvements féministes alternatifs, dans une visée non seulement plus inclusive, mais subversive des tendances néolibérales. La perspective de classe a toujours tenu une importance primordiale dans l’élaboration et l’application de sa pensée : loin des dynamiques de politiques identitaires ramenant tout à l’individu, bell books aborde les questions d’oppression et d’exploitation à travers le prisme structurel.
Vision révolutionnaire de l’amour
Au-delà de son apport incommensurable aux débats et aux mouvements anti-racistes et féministes, bell hooks les aura a jamais marqués par sa vision révolutionnaire de l’amour. Dans All About Love, bell hooks redéfinit l’amour comme une action et non pas comme un sentiment. Appréhender l’amour en tant que verbe, en tant qu’action, nous permet de nous ouvrir à plus de responsabilité et de redevabilité.
Pour bell hooks, l’amour, y compris l’amour-propre, est politique. L’amour, sorti des carcans oppressifs de la société capitaliste, bourgeoise et hétéronormative, redevient une force infinie et non circonscrite aux relations romantiques sanctionnées par la société, l’État et/ou les institutions religieuses.
Dans une société qui perçoit les sentiments, la vulnérabilité demandée par l’amour comme des faiblesses, dans une société qui a fait de l’amour une commodité régie par une certaine morale sexiste, patriarcale, homophobe, transphobe et par la logique transactionnelle néolibérale, l’idée d’un amour politique, ouvert, assumé est synonyme de libération, non seulement des corps mais aussi des cœurs.
Et pour cette simple idée, pour le potentiel qu’elle contient, nos mouvements lui seront à jamais reconnaissants.
Article publié par solidaritéS.