Comme en 2009 et en 2013, la présidentielle de novembre a été marquée par une fraude caractérisée. Les mobilisations ne faiblissent pas contre la réélection du président de droite Juan Orlando Hernández.
Le 26 novembre, alors que Salvador Nasralla, candidat de la coalition Alliance contre la dictature, devançait le président sortant Juan Orlando Hernández (JOH), le système informatique centralisant les résultats est tombé en panne. A trois reprises. Quand le décompte a repris, des bulletins sortis de nulle part ont donné l’avantage à JOH.
En juin 2009 déjà, un coup d’Etat a renversé Manuel Zelaya, au prétexte qu’il voulait se faire réélire à la présidence. En 2015 pourtant, une décision de justice a autorisé JOH à se présenter pour un second mandat en 2017.
Selon Alberto Pradilla, JOH «est un allié des Etats-Unis et le partisan d’une politique répressive contre la violence. Il a été établi que son frère avait des liens avec le narcotrafic. Depuis son arrivée au pouvoir, JOH s’est emparé des différentes institutions publiques au point de les contrôler presque intégralement [avec des destitutions suivies de nominations d’affidés aux postes-clés du pouvoir judiciaire, de l’armée et de la police]», (Publico, 5.12.2017).
Une fraude programmée
Rappelons que le président du Tribunal suprême électoral (TSE), David Matamoros, est un proche de JOH, ce qui autorise quelques doutes quant à son impartialité.
La fraude électorale a été si flagrante que les missions d’observation de l’Union européenne (UE) et de l’Organisation des Etats américains (OEA) n’ont pu valider les résultats du TSE. Elles ont demandé, relayant l’Alliance contre la dictature et le Parti libéral, de recompter les bulletins de 5000 bureaux électoraux. Le 9 décembre, le TSE est finalement entré en matière pour 4753 bureaux. Mais le décompte final vient de confirmer la victoire de JOH.
Mobilisation contre la fraude
Avant même le début des tripatouillages électoraux, Salvador Nasralla avait appelé à la mobilisation contre une fraude possible. L’inversion de la tendance et la crainte d’une manipulation des résultats ont fait descendre dans les rues du Honduras des milliers de manifestant·e·s. Le bilan de la répression est lourd: à ce jour, 20 morts et plus de 100 arrestations. Le 1er décembre, JOH a décrété l’état d’exception. La mesure n’a pas empêché des manifestations massives le 3 décembre, dans la capitale et d’autres villes, comme San Pedro Sula et Tocoa.
Preuve du malaise ambiant: le 4 décembre, des membres des forces spéciales de la police hondurienne se sont mis en grève, prévenant qu’ils ne réprimeraient plus la population. Une grève suivie dans huit villes du pays.
Berta Cáceres l’avait bien dit
La regrettée Berta Cáceres avait décrit le système d’après le coup d’Etat de 2009 ainsi: «Ce qui a été mis en place, c’est une politique de criminalisation, de répressions, de lynchages, de harcèlement sexuel, d’agression contre nos familles, nos communautés et nos leaders» (L’Humanité, 3-5.11.2017). La mobilisation populaire pourra-t-elle enfin en finir avec ce système pourri?
Publié sur le journal de solidaritéS
La vérité sur l'assassinat de Berta Cáceres
Huit prévenus, dont trois militaires, sont actuellement emprisonnés. Mais les commanditaires de cet assassinat sont désignés, un an et demi plus tard, dans le rapport d’une commission internationale de juristes: «La participation de nombreux travailleurs d’Etat (policiers, militaires, fonctionnaires), ainsi que des directeurs et employés de DESA [ndlr: entreprise impliquée dans le barrage de Agua Zarca] est évidente dans la planification, l’exécution et la dissimulation de l’assassinat» (L’Humanité, 3-5.11.2017).
Le rapport précise que, depuis 2012, le ministère public du Honduras tenait un registre détaillé des attaques contre le COPINH. On peut y lire: «L’assassinat fut planifié par de hauts dirigeants de DESA, qui firent surveiller Berta et le COPINH par certains de leurs employés et agirent en alliance avec des forces de la sécurité de l’Etat et avec des structures parallèles de sécurité» (Eliana Gilet, Brecha, 24.11.2017).
Dans le contexte politique du Honduras, depuis le coup d’Etat oligarchique de juin 2009, l’impunité reste totale: «Les agents en charge de l’enquête n’ont pas suivi les normes pour instruire, juger et sanctionner toutes les personnes responsables de l’assassinat de Cáceres» (L’Humanité, 3-5.11.2017). La fille de Berta Cáceres, Olivia Zúniga Cáceres, candidate du Parti LIBRE aux élections de novembre 2017, fait d’ailleurs état d’une recrudescence des menaces contre elle-même et sa famille.
Hans-Peter Renk
La vérité sur l’assassinat de Berta Cáceres
Coordinatrice du Conseil citoyen des organisations populaires et indigènes du Honduras (COPINH), Berta Cáceres a été assassinée le 3 mars 2016 à son domicile. Elle avait mené de nombreuses luttes contre des mégaprojets néfastes à l’environnement, tels que le barrage hydroélectrique de Agua Zarca et la privatisation du Rio Gualcarque, une rivière sacrée pour le peuple autochtone Lenca auquel appartenait Berta Cáceres.
Huit prévenus, dont trois militaires, sont actuellement emprisonnés. Mais les commanditaires de cet assassinat sont désignés, un an et demi plus tard, dans le rapport d’une commission internationale de juristes: «La participation de nombreux travailleurs d’Etat (policiers, militaires, fonctionnaires), ainsi que des directeurs et employés de DESA [ndlr: entreprise impliquée dans le barrage de Agua Zarca] est évidente dans la planification, l’exécution et la dissimulation de l’assassinat»(L’Humanité, 3-5.11.2017).
Le rapport précise que, depuis 2012, le ministère public du Honduras tenait un registre détaillé des attaques contre le COPINH. On peut y lire: «L’assassinat fut planifié par de hauts dirigeants de DESA, qui firent surveiller Berta et le COPINH par certains de leurs employés et agirent en alliance avec des forces de la sécurité de l’Etat et avec des structures parallèles de sécurité» (Eliana Gilet, Brecha, 24.11.2017).
Dans le contexte politique du Honduras, depuis le coup d’Etat oligarchique de juin 2009, l’impunité reste totale: «Les agents en charge de l’enquête n’ont pas suivi les normes pour instruire, juger et sanctionner toutes les personnes responsables de l’assassinat de Cáceres» (L’Humanité, 3-5.11.2017). La fille de Berta Cáceres, Olivia Zúniga Cáceres, candidate du Parti LIBRE aux élections de novembre 2017, fait d’ailleurs état d’une recrudescence des menaces contre elle-même et sa famille. HPR