Depuis le 22 juin 2023, l’ensemble des travailleurs·euses du Services d’Aide à la Jeunesse (SAJ) et du Services de Protection de la Jeunesse (SPJ) de Charleroi sont en grève. Conseiller·ères, directeurs·trices, délégués·e·s, personnel administratif… Elles et ils ont été rejoints par les SAJ de Mons, Namur, Tournai, Liège. Le mouvement fait tâche d’huile…

En front commun (CSC services publics, SLFB secteur public,et CGSP AMIO) les travailleurs·euses disent STOP et réclament de pouvoir disposer de moyens pour accomplir leur mission dans l’intérêt des jeunes de 0 à 18 ans et de leurs familles.

Depuis de nombreuses années, les travailleurs·euses de ces services alertent et mettent le focus sur le sous-financement du secteur de l’Aide à la Jeunesse. Les difficultés de recrutement, la rotation du personnel, la surcharge de travail, la lourdeur des situations prises en charge nécessitent des réponses adaptées aux besoins des bénéficiaires… aujourd’hui plus que jamais ces réponses font défaut. Ce constat est le même dans les différents arrondissements judiciaires bien qu’il existe des spécificités locales.

S’il est évident qu’il est indispensable de débloquer les budgets nécessaires à l’engagement pérenne de personnel, à sa formation continue, cela ne constitue pas l’unique solution aux problèmes que vivent les intervenant·e·s dans leur quotidien.

Les revendications actuelles des travailleurs·euses portent sur le manque de capacités de prises en charge des jeunes principalement en milieu résidentiel : SRG (Services résidentiels généraux), SRU (Services résidentiels d’Urgence) et également de prises en charge dans le cadre d’un accompagnement psycho-socio-éducatif au sein de la famille (SASE, SAPSE).

Une situation qui dure et perdure

Cette situation dure et perdure, à ce stade les SAJ et SPJ poursuivent leur lente agonie emportant avec eux des travailleurs·euses de plus en plus en souffrance… Cette maltraitance institutionnelle qu’elles et ils vivent est inacceptable. Ce qui l’est davantage encore c’est la maltraitance que subissent les jeunes et les familles qui ne trouvent pas l’aide, la protection, le soutien et l’accompagnement dont ils et elles ont besoin.

Le désinvestissement du secteur de l’Aide à la Jeunesse nous renvoie tel un boomerang au désinvestissement des services publics, des services au public. Ceux et celles qui restent sur le carreau sont les plus fragiles et les plus précarisé·e·s d’entre nous, enfermé·e·s dans le cycle infernal de la reproduction des inégalités.

Des exemples concrets, il en existe tant et tant : comme ce jeune garçon de sept ans, victime de graves maltraitances sexuelles, physiques et psychologiques qui a tourné durant neuf mois dans les services d’accueil d’urgence (40 jours max dans chacun de ces services) avant d’enfin se poser dans un Service résidentiel général (SRG) où la prise en charge est à moyen ou long terme. À la maltraitance vécue s’ajoute la maltraitance de la faillite du système de Protection de la Jeunesse.

Ce cas n’est pas isolé, le SPJ de Charleroi gère plus de 2000 situations d’enfants de plus en plus lourdes et dramatiques. Une récente étude sur le terrain montre que pour la division de l’arrondissement de Charleroi, il manque 400 places institutionnelles. À cela, il faut ajouter des situations d’extrême urgence : aujourd’hui, 25 jeunes enfants sont hospitalisés en pédiatrie faute d’accueil adapté à leurs besoins, ce que nous confiait pas plus tard que le 28 juin une directrice du SPJ.

Que dit la Ministre Glatigny, lors de la rencontre du 23 juin entre le Cabinet et les syndicats ? La CGSP constate qu’il n’y a pas de vraies avancées. Madame Glatigny affirme son engagement pour demander le recrutement de 47 ETP (équivalents temps-plein) pour l’ensemble des SAJ et SPJ lors du prochain conclave budgétaire d’octobre au gouvernement.

Cerise sur le gâteau, elle imagine la mise en place d’une nouvelle plateforme en concertation avec L’AVIQ (1)Agence wallonne pour une vie de qualité, la Santé Mentale et l’Aide à la Jeunesse où une cellule pourra recevoir la demande du délégué et faciliter la recherche de place pour les jeunes dits « à la croisée des chemins », entendez de ces secteurs… On comprendra qu’il s’agit d’un nouvel outil mais qu’il manque la matière première. Traduisez : pas de création de nouvelles places. Enfin, Madame la Ministre très soucieuse de la santé mentale de ces travailleurs et travailleuses propose un soutien psychologique collectif à partir du 1 juillet d’abord à destination des SAJ/SPJ de Mons et de Charleroi.

Les travailleurs et travailleuses soutenu·e·s par leur Conseillers·ères et Directeurs·trices décident de poursuivre leur lutte. Elles et ils en appellent à la solidarité du secteur : n’hésitons pas à leur rendre visite, iels se relaient devant leur service.

Sources : Communiqué CGSP, rencontres avec les travailleurs·euses et responsables de services, source direct du SPJ de Charleroi.
Image : Capture d’écran d’un reportage de TéléMB du 27 juin 2023.

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