Le 24 février dernier s’est tenu un rassemblement de quelques centaines de personnes en soutien aux personnes qui campent actuellement devant le Petit-Château (centre ouvert géré par Fedasil, l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs·euses d’asile) depuis six mois.
Une centaine de tentes sont installées de côté molenbeekois du canal et sur le pont devant le Petit-Château. Pour la plupart, ce sont des hommes d’origine afghane, mais il y a aussi des Mauritaniens, Burundais, Érythréens et Palestiniens, ainsi que des personnes qui ont été expulsées du squat rue des Palais.
Les revendications formulées ce jour-là portaient essentiellement sur les promesses non tenues du gouvernement et le traitement inhumain des réfugié·e·s, ainsi que la discrimination liée aux doubles standards. Les demandeuses présentes devant le Petit-Château sont en effet confrontées à des exigences beaucoup plus strictes que les réfugié·e.s ukrainien.ne.s. Médecins du Monde demande que les personnes réfugiées aient toutes et tous les mêmes droits, selon les normes internationales (accès aux soins, droit au travail et à l’éducation, permis de séjour, liberté de circulation). Du côté de Fedasil, hors micro, on brandit l’argument éculé de « l’appel d’air » pour expliquer l’inaction du gouvernement. Au terme des discours, une chaîne humaine s’est organisée autour du Petit-Château.
Faute de soins, la gale s’est répandue dans le campement
Une association présente sur place distribue des petits-déjeuners, Médecins sans Frontières a installé un hub médical, la Croix-Rouge est également présente et des habitant·e·s du quartier distribuent des couvertures. Faute de soins, la gale s’est répandue dans le campement. Une personne afghane a montré ses blessures infligées par les talibans. Cette personne s’est rendue dans un hôpital de Bruxelles, mais n’aurait pas reçu les soins appropriés.
Suite à l’évacuation du squat de la rue des Palais à Schaerbeek le 14 février dernier, 140 places ont été libérées en urgence à Anderlecht et 180 autres places ont été ouvertes de façon temporaire dans un hôtel de Leeuw-Saint-Pierre. Plusieurs ONG, dont Médecins Sans Frontières, dénoncent cette situation que le gouvernement semble laisser pourrir. Parmi les personnes qui avaient trouvé refuge dans le squat rue des Palais, 250 ont pu trouver un abri provisoire dans des structures de différentes ONG, tandis que près de 200 se sont retrouvées à la rue. Des dizaines ont rejoint les Afghans devant le Petit-Château. Des places ont été ouvertes au Crossing – un centre d’hébergement temporaire mis en place suite à l’évacuation du squat rue des Palais – à Schaerbeek, mais elles sont insuffisantes.
Ci-dessous, le témoignage de T., présent devant le Petit-Château le 24 février :
Ce qu’on constate ici, près du Petit-Château, c’est une situation inadmissible, hallucinante. Il y a presque 250 à 300 personnes qui dorment dehors depuis des semaines et des semaines, tout en sachant que ce sont des demandeurs d’asile qui ont le droit à l’accueil, mais malheureusement, suite à une volonté politique, on laisse ces gens dans les rues. Moi je pointe le doigt vers les politiques car ils ont la possibilité et les moyens de résoudre ce problème. Il y a plusieurs centres, plusieurs hôtels… Leur façon de faire, c’est de laisser désespérer ces gens-là [les personnes en demande d’asile], d’envoyer un mauvais signe comme quoi il n’y aurait pas assez de places ici en Belgique, mais c’est le contraire. C’est une volonté politique pour laisser cette situation s’aggraver jour après jour. On a constaté ce qui s’est passé au Palais, il y a eu 3 morts, une mauvaise gestion, il y avait presque 800 personnes au Palais des Droits – moi, je l’appelle le Palais de la Honte. Voilà le problème. Personnellement, je suis un ex sans-papier et un ex porte-parole d’un mouvement. C’est une problématique politique, malheureusement les partis politiques ne font pas assez pour résoudre ce problème. Je pointe le doigt vers ces soi-disant partis progressistes.
Ali, également présent au rassemblement, nous explique en quelques mots la raison pour laquelle il est venu manifester aujourd’hui :
Je m’appelle Ali, je viens ici en soutien à l’ensemble des réfugiés. Je suis hyper-sensibilisé par la situation et la question des réfugiés parce que, d’une part, mon père était réfugié – il est arrivé dans ce pays il y a 36 ans – et, par ailleurs, ça fait maintenant un mois et demi qu’on se bat pour éviter l’expulsion de trois Iraniens. On a déjà fait arrêter six fois l’avion à l’aéroport en obstruant le check-in. Le gouvernement actuel, le gouvernement Vivaldi est en train de donner une image hyper inhumaine de la Belgique. En tout cas, c’est une chose contre laquelle on va se battre. On va continuer à se rassembler et il n’y a qu’une solution, c’est qu’on soit être tous ensemble unis et soudés pour montrer qu’on a des valeurs dans ce pays et qu’on va défendre nos valeurs et soutenir ceux qui en ont besoin et ceux qui nous demandent de les soutenir.
TVS, militant antiraciste
Photo : Rassemblement devant le Petit-Château à Bruxelles, le 24 février 2023. (Gauche anticapitaliste / CC BY-NC-SA 4.0)