Le village de Lützerath (à l’ouest de Cologne) est en train d’être rasé parce que le groupe énergétique RWE extrait du lignite à ciel ouvert dans le bassin minier de Garzweiler II. La combustion du lignite est la forme d’énergie la plus « sale » qui soit et Garzweiler II est la plus grande source d’émission de CO2 en Europe.
Si Lützerath est rasé, RWE (1)Ce n’est qu’un aspect secondaire, mais suffisamment dramatique en soi : avec l’exploitation à ciel ouvert, un immense paysage de cratères (un paysage lunaire) se forme. En 2022, année où nous avons connu en Europe les plus fortes sécheresses depuis 500 ans, RWE a consommé autant d’eau que 11 millions de personnes en Allemagne. Au niveau international également, RWE est présente partout où il y a encore du profit à faire avec l’énergie fossile. Ainsi, RWE participe au projet de gaz offshore au large des côtes australiennes. On estime que les émissions de CO2 y atteindront près de deux milliards de tonnes, soit plus du double des émissions annuelles de l’Allemagne. Et ce projet menace directement la Grande barrière de corail dans son existence. RWE est aujourd’hui présent dans 36 pays et défend bec et ongles sa stratégie fossile. Parce que les Pays-Bas ont décidé d’abandonner le charbon en 2019, RWE les a poursuivis en justice pour obtenir un dédommagement de 1,4 milliard d’euros. Cela vient d’être rejeté par le tribunal de La Haye, et RWE commente avec indignation : « Une atteinte à notre propriété sans recevoir de compensation n’est pas acceptable ». Il n’y a qu’une seule bonne réponse à cela : l’expropriation sans indemnisation de RWE et la conversion de l’énergie aux énergies renouvelables sous le contrôle des salariés. aura accès à 280 millions de tonnes de charbon et le droit de les brûler. Peu importent les mesures politiques qui seront prises prochainement pour protéger le climat : la combustion de ce lignite ne permettra pas de respecter l’engagement pris par l’Allemagne dans le cadre de l’accord de Paris.
Des milliards en jeu
La destruction de Lützerath et la combustion du charbon sont un pas de plus vers l’aggravation de la catastrophe climatique. Chaque tonne de CO₂ émise conduit à ce que davantage de personnes souffrent de vagues de chaleur, de temps extrêmes, de sécheresses, de famine et de maladies qui se propagent.
Les prix de l’énergie ont atteint des sommets vertigineux que de nombreuses personnes ne peuvent plus payer. Pendant ce temps, le groupe énergétique RWE se réjouit d’un bénéfice doublé de plusieurs milliards d’euros et prévoit 5,5 milliards d’euros pour cette année.
L’accord passé avec le gouvernement fédéral et régional, selon lequel RWE veut sortir du charbon dès 2030 (au lieu de 2038), est typique. Ce « compromis » permet au groupe de réaliser des bénéfices supplémentaires, car il permet de continuer à faire fonctionner des centrales nucléaires qui, d’un point de vue de la politique climatique, devraient être arrêtées sous peu.
L’objectif de 1,5 degré est extrêmement menacé
Aujourd’hui, nous nous dirigeons déjà à toute vitesse vers une catastrophe climatique. Selon une étude récente de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) (2)« Global Annual to Decadal Climate Update », en ligne sur https://library.wmo.int/index.php?lvl=notice_display&id=22083#.Y5HsjMuZMY0, un réchauffement de la planète de 1,5 degré pourrait déjà être atteint dans les cinq prochaines années, menaçant ainsi d’une accélération de la réaction climatique en chaîne : un cataclysme.
Les scientifiques et le mouvement de protection du climat ne sont pas les seuls à le savoir. Les politiciens et les capitalistes le savent également, mais il s’avère une fois de plus que la bourgeoisie ne poursuit que ses intérêts de profit immédiats, fidèle au principe : « Après moi le déluge ».
Dans le cas présent, le groupe énergétique a été aidé par la guerre en Ukraine, qui a entraîné un renchérissement de l’approvisionnement en énergie, ce dont le gouvernement a profité pour créer une véritable hystérie, lui permettant d’imposer : une prolongation de la durée de vie de trois centrales nucléaires jusqu’à la mi-avril 2023 ; une extraction plus rapide du lignite du bassin de Garzweiler II ; des terminaux de gaz liquéfié construits sur la côte pour le débarquement de gaz de fracturation en provenance des États-Unis ; etc.
Résistance
Plusieurs centaines de personnes ont occupé les dernières maisons de Lützerath au cours des derniers mois et, le 14 janvier, 35 000 personnes ont manifesté près de Lützerath malgré une pluie battante. Certes, le village a été évacué entre-temps, mais la perte de crédibilité des politiciens s’est encore accrue. Les Verts, qui participent à la fois au gouvernement fédéral et au gouvernement régional, sont particulièrement touchés. La sympathie générale pour les activistes climatiques est grande, mais tant que la force organisée du mouvement ouvrier ne pèsera pas de tout son poids et qu’il n’y aura pas de grèves, ce processus meurtrier de réchauffement du climat ne pourra pas être arrêté.
Article initialement publié dans l’Hebdo L’Anticapitaliste, n°646 (26/01/2023), sur le site lanticapitaliste.org.
Photo: Manifestation à Lützerath, le 10 janvier. Crédit Photo: Wikimedia Commons / Lützi Lebt.
Notes