L’Italie se précipite vers une nouvelle catastrophe sanitaire et sociale dont le gouvernement Draghi (présenté par les médias comme le gouvernement des « meilleurs ») est entièrement responsable.
La pandémie, qui a déjà fait environ 140 000 victimes (et qui sait combien d’autres milliers de personnes ont perdu la vie à cause d’autres pathologies que la crise de la santé n’a pas permis de soigner), connait une reprise des contaminations sans précédent (plus de 200 000 contaminations par jour) qui frappe aussi les plus jeunes et qui porte à environ 2 millions le nombre des personnes positives au covid.
Tout pour la « reprise » économique
C’est une croissance exponentielle, contre laquelle le gouvernement n’a voulu prendre à temps aucune initiative radicale, se limitant à des mesures partielles, inefficaces et contradictoires. Les structures sanitaires sont confrontées à une crise catastrophique, comme c’était déjà le cas en 2020, alors que le gouvernement se refuse à prolonger la fermeture des écoles après les vacances comme le demandent non seulement les syndicats et les responsables scolaires, mais aussi les experts sanitaires et les gouvernements de région, sous prétexte que cela empêcherait beaucoup de parents d’aller au travail.
L’objectif du gouvernement, pendant tous les mois de forte reprise économique (avec une croissance annuelle supérieure à 6%), a été de faire en sorte que les productions et les affaires du commerce, de la restauration, du sport, etc., ne rencontrent aucun obstacle. Non seulement les secteurs productifs ont toujours été en activité, mais on a rouvert les écoles avec 100% d’élèves en présence, en surchargeant les classes sans respecter les règles de distanciation ; on s’est débarrassé de fait de toutes les règles qui fixent la jauge des transports et des manifestations sportives et enfin, vu que les mises en quarantaine des travailleurEs risquent de perturber la marche des affaires ; on s’est débarrassé aussi de la mise en quarantaine des vaccinéEs, ce qui permet de continuer à travailler même après avoir eu des contacts étroits avec des sujets diagnostiqués positifs. Voilà le contexte dans lequel la pandémie a pu manifester toute sa force.
L’enjeu de la vaccination
La politique sanitaire du gouvernement Draghi s’est limitée à la vaccination — qui, certes, est fondamentale — en pensant que cela suffirait à limiter les contaminations et à garantir « le retour à la normalité », c’est-à-dire au business as usual. Toutes les forces de la gauche de classe et les syndicats ont fait campagne pour une vaccination de masse, outil indispensable pour avoir une certaine sécurité sanitaire collective, sur les lieux de travail, dans les réunions et les manifestations ; elles se sont aussi battues pour que les vaccins soient disponibles pour toutes et tous, non seulement en Italie mais dans tous les pays du monde, en revendiquant un moratoire sur les brevets. Les syndicats ont demandé des interventions sanitaires et structurelles globales et la vaccination obligatoire, mesure que la Constitution rend possible lors d’événements extraordinaires. La valeur des vaccins n’a pas été remise en question, mais il était évident qu’il s’agissait d’une efficacité partielle : leur utilisation devait être accompagnée d’importants investissements dans les structures sanitaires, l’école, les transports et le suivi des contaminations. Mesures que le gouvernement n’a pas prises alors qu’il disposait d’importants fonds européens (plan Next Generation UI), dépensés au contraire pour subventionner les entreprises privées.
Draghi et ses ministres ont aussi instrumentalisé le mouvement No Vax, très minoritaire dans le pays mais que l’importante publicité faite par les médias a relancé, pour se fabriquer une opposition sociale commode qui leur permette de cacher leurs choix sanitaires mais aussi économiques et sociaux contenus dans la loi de bilan contre laquelle deux des trois principales centrales syndicales (la CGIL et l’UIL(1)CGIL : Confédération générale italienne du travail ; UIL: Union italienne du travail..) ont appelé à une grève générale nationale le 16 décembre.
« Des mesures partielles, d’une efficacité douteuse »
Par son dernier décret, le gouvernement a imposé l’obligation vaccinale pour toutEs les plus de 50 ans ; cela deviendra d’ici quelques jours une condition pour pouvoir aller au travail mais aussi pour pouvoir fréquenter les transports publics, les restaurants, etc. Comme l’a dit un médecin-chef connu: « Ce sont des mesures partielles d’une efficacité douteuse, qui dans tous les cas arrivent tard et ne pourront avoir quelque effet qu’aux calendes grecques ». Pendant ce temps, la propagation des contaminations met hors-jeu pour raison de maladie ou de quarantaine des dizaines de milliers de travailleuses et de travailleurs dans tous les secteurs des services, en premier lieu dans la santé, mais aussi l’école, les transports, les postes, etc. Le lockdown, tant redouté par le gouvernement et les patrons, risque de se concrétiser dans le plus grand chaos sanitaire, gestionnaire et social, faisant d’autres milliers de victimes.
Le gouvernement Draghi, après avoir rempli la fonction qui justifie son existence — distribuer plus de 100 milliards aux entreprises capitalistes grâce au Plan National de Relance et de Résilience et la loi de finance — mais après avoir été incapable d’affronter la pandémie, semble maintenant en crise car les partis qui le composent sont divisés et en conflit entre eux. Et le 24 janvier, sénateurs (315), députés (630) et délégués régionaux (58) sont appelés à Rome pour élire le nouveau Président de la République et ces votes pourraient s’éterniser. Et alors, pour la sécurité sanitaire, quelle politique ?
Traduction Bernard Chamayou pour L’Anticapitaliste.
Crédit Photo : Wikimedia commons
Notes