Le groupe de citoyennes et citoyens qui nous servent actuellement de gouvernements se sentent pousser des ailes. Les mesures autoritaires et apparemment irrationnelles se suivent pour imposer leurs désidérata à une population qui est désorientée.
Peu de personnes comprennent les mécanismes de transmission de l’épidémie. Le principal mécanisme de contagion semble se trouver dans les minuscules aérosols. Si la personne contagieuse fumait, toutes celles qui perçoivent l’odeur du tabac pourraient être contaminées. D’autres mécanismes ne sont pas absents pour autant. Mais il est clair que la fermeture des concentrations intérieures, telles les écoles et les lieux de travail en intérieur devraient cesser pour un temps afin d’endiguer la propagation de la maladie. Le patronat s’oppose à toute fermeture des bureaux et des ateliers. Le gouvernement invente toutes les mesures possibles et imaginables pour freiner l’épidémie en obéissant aux vœux patronaux. Voilà pourquoi le gouvernement à l’air d’être déboussolé.
Le gouvernement invente toutes les mesures possibles et imaginables pour freiner l’épidémie en obéissant aux vœux patronaux. Voilà pourquoi le gouvernement à l’air d’être déboussolé.
Il en va de même pour le nucléaire. Il devient de plus en plus clair que la question de la production future d’électricité n’est pas un dilemme mais un bien un « trilemme », une question à trois réponses possibles : nucléaire, gaz ou renouvelables. Mais un tabou (1)Ou une rupture transcendante, comme dans le trilemme de Münchhausen empêche de nommer les sources renouvelables de courant : leur rentabilité à court terme n’est pas certaine donc le secteur privé ne veut presque pas y investir. Et la dispersion des sources rendrait le système trop perméable aux pressions locales, le pouvoir du propriétaire vacillerait. Donc le choix de ce gouvernement se limite à choisir la bonne combinaison entre les centrales nucléaires de ENGIE-Electrabel et/ou EDF-Luminus d’un côté et les centrales à gaz appartenant aux mêmes de l’autre.
L’éléphant dans la pièce, dont tous nient la présence énorme, est l’arrêt de la Cour Constitutionnelle (2)Arrêt n°34/2020 du 5 mars 2020., fondé solidement sur un avis de la Cour de Justice européenne, qui établit que le prolongement de la durée de vie d’un réacteur nucléaire est soumis aux traités d’Espoo et Aarhus, c’est-à-dire qu’il doit faire l’objet d’une enquête publique.
Le jugement, très tardif, concerne uniquement Doel 1 et 2. Les associations antinucléaires établies ont omis d’élargir le jugement à Tihange 1. Est-ce que les partis Verts ont pu utiliser cet argument juridique dans les négociations à propos du CRM (3)Mécanisme de rémunération de capacité avec Mme Marghem et le gouvernement Michel ? Est-ce que cela a pesé sur la rédaction de l’accord gouvernemental ? Ne pas utiliser cet argument serait stupide, ce que la direction des Verts n’est pas.
Ce gouvernement se montre incapable de prendre une décision électrique annoncée pour novembre avant le 1 avril 2022. La pression du lobby pronucléaire, regroupant la grande industrie consommatrice (FEBELIEC), les exploitants (ENGIE et EDF) mais aussi le « village nucléaire » qui entoure l’industrie (CEN-NSK, FANC-AFCN, Vinçotte, maintenance…) est extrêmement puissant. La position d’ENGIE, qui réitère qu’il est trop tard pour prolonger « sans changer les lois et règlements » est très confortable. Techniquement, rien ne s’oppose à l’extension de la durée de vie des réacteurs. Mais il faudra trouver une solution au jugement de la Cour Constitutionnelle et aux règles qui imposent certains investissements décennaux. Donc cela va coûter bonbon aux contribuables et provoquer des concessions majeures du gouvernement, y compris pour un retour au nucléaire pourtant interdit par la loi de sortie du nucléaire de 2003.
La probabilité d’une catastrophe n’est pas négligeable, et l’ampleur de la catastrophe qu’un « Tchernobyl » causerait dans la région anversoise ou liégeoise serait terrible.
La volonté de fermer les centrales se mesurera à la rapidité de la fermeture de Doel 3 et Tihange 2. Ces deux « réacteurs à fissures » que même le Premier ministre appelle désormais « scheurtjesreactoren » (4)Littéralement « réacteurs à fissures » en public sont extrêmement dangereux. Mme Van der Straeten((Ministre fédérale de l’Énergie, Groen) l’a plaidé devant le tribunal bruxellois dans son métier précédent d’avocate de l’environnement avec beaucoup d’intelligence et d’engagement. Il faut arrêter D3 et T2 immédiatement et définitivement si on veut s’engager sur la voie de la fermeture. La probabilité d’une catastrophe n’est pas négligeable, et l’ampleur de la catastrophe qu’un « Tchernobyl » causerait dans la région anversoise ou liégeoise serait terrible.
Dans des conditions normales, avant le COVID, l’incapacité de ce gouvernement à prendre une décision réfléchie aurait déjà mené à sa chute. C’est la menace d’une absence totale de gouvernement pendant cette crise sanitaire qui le maintient en selle pour le moment. Un mouvement social d’ampleur, par exemple pour le rétablissement intégral de l’index face à l’inflation, pourrait par contre provoquer une crise nationale.
25 12 2021
Notes