Samuel Farber est né et a grandi à Cuba. Il est l’auteur de nombreux livres et articles traitant de ce pays. Il est l’auteur notamment de Che Guevara, ombres et lumières d’un révolutionnaire, Syllepse, 2017.
Le fait que des médecins cubains soient envoyés à l’étranger par leur gouvernement pour aider à résoudre la crise sanitaire actuelle du Covid-19 est évidemment une bonne chose. Pour les bénéficiaires, c’est sans aucun doute un cadeau inestimable et salvateur. Pour beaucoup de gens, c’est une expression de plus du caractère progressiste de l’État cubain.
Pourtant, il est important de faire ressortir des aspects moins connus de ce programme de médecins cubains à l’étranger, y compris les avantages financiers obtenus par le gouvernement et les conditions dans lesquelles ses médecins travaillent sur l’île et à l’étranger qui révèlent le caractère antidémocratique de l’État cubain et l’impact que cela a sur le peuple cubain.
Selon le gouvernement cubain, celui-ci facture ses clients médicaux à l’étranger selon un barème en fonction des possibilités économiques de chaque pays et, dans certains cas, il fournit gratuitement les services de ses médecins. Ce qu’on ne sait cependant pas est que l’exportation par le gouvernement cubain de ses services médicaux constitue, en fait, un important commerce et une source de profit pour l’État. En 2018, l’État cubain a gagné 6,2 milliards de dollars grâce à l’exportation de services médicaux, constituant sa plus grande source de devises (The Guardian, 6 mai 2020), soit deux fois plus que ses revenus en devises provenant des envois de fonds des Cubains de l’étranger, son deuxième plus important revenu, également supérieur au tourisme qui est son troisième revenu en devises étrangères. En 2019, les services médicaux représentaient 46% des exportations cubaines et 6% du PIB de l’île.
À la fin de 2018, les opérations médicales cubaines à l’étranger avaient impliqué le déplacement de 28’000 médecins et autres personnels médicaux vers 67 pays, en recul par rapport au niveau plus haut de 50’000 en 2015, avant que les médecins cubains ne soient expulsés de pays comme le Brésil, la Bolivie, El Salvador et l’Équateur, leurs gouvernements respectifs virant vers la droite et l’extrême droite, comme dans le cas de Jair Bolsonaro au Brésil.
Les médecins cubains ne reçoivent qu’environ 25% de ce que les gouvernements étrangers paient aux autorités cubaines pour leurs services (la plupart des pays d’accueil fournissent également un logement gratuit aux médecins cubains, bien que de qualité très variable). Ces médecins n’ont aucun moyen de négocier leur part avec le gouvernement cubain car ils n’ont pas le droit d’organiser des syndicats indépendants pour faire valoir leurs revendications. Les syndicats à Cuba sont contrôlés par l’État et fonctionnent comme l’une des principales courroies de transmission des politiques et décisions du Parti communiste cubain. Et les médecins à l’étranger sont soumis à une série de règles gouvernementales limitant et tentant d’empêcher leur mobilité et leur désertion à l’étranger, comme par exemple par le fait que leur indemnisation, ou une partie de celle-ci, est conservée par l’État à Cuba même, et qu’ils aient l’obligation de quitter leur conjoint et/ou des enfants les laissant derrière eux sur l’île. De plus, les médecins cubains doivent remettre leur passeport à leurs superviseurs dès leur arrivée dans le pays étranger où ils vont exercer. Toute désertion est lourdement punie en interdisant aux déserteurs de visiter Cuba pendant huit ans, même s’ils sont citoyens cubains.
Pourtant, les médecins cubains sont plus que disposés à exercer à l’étranger sous le parrainage de leur gouvernement. Mis à part les sentiments humanitaires qui peuvent les motiver, les 25 % très réduits du salaire qu’ils reçoivent pour leurs services à l’étranger sont bien meilleurs que ce qu’ils gagneraient normalement à Cuba. Comme Ernesto Londoño l’a souligné dans un article du New York Times du 29 septembre 2017, à propos des médecins cubains au Brésil – à ce moment-là, 18’000 médecins cubains avaient déjà servi dans ce pays – l’accord des autorités cubaines et brésiliennes en 2013, a permis à chacun médecin cubain de recevoir, après que son propre gouvernement ait prélevé sa très importante propre tranche, 2900 reais par mois, soit une valeur de 1400 dollars en 2013 et 908 dollars en 2017. Un montant vraiment extraordinaire, même après la forte augmentation des salaires en mars 2014, par rapport aux 1500 pesos, ou 60 dollars par mois (au change actuel d’environ 25 pesos nationaux cubains ou CUP pour un dollar) qu’ils auraient touchés à Cuba (Havana Times, 21 mars 2014). En plus de gagner beaucoup plus d’argent que sur l’île, les médecins cubains au Brésil, comme dans de nombreux autres pays où ils ont travaillé, ont également eu accès à un large éventail de biens de consommation non disponibles à chez eux, et qu’ils peuvent rapporter chez eux à leur retour, un problème non mentionné par Londoño. Il s’agit ici d’un autre exemple de personnes se soumettant volontairement à des conditions d’exploitation faute d’une alternative.
Le gouvernement cubain, et ses défenseurs à l’étranger, ont souvent justifié la réduction de 75% sur le salaire des médecins à l’étranger en soulignant qu’il s’agissait d’un moyen équitable de rembourser à l’État des dépenses publiques engagées pour former ces médecins gratuitement. En fait, cependant, selon le gouvernement cubain, les médecins cubains sont considérés comme ayant «remboursé» leur éducation gratuite après avoir effectué leur «service social» – en mettant à disposition à temps plein, immédiatement après l’obtention de leur diplôme, leurs compétences nouvellement acquises pendant une période de deux ans, (trois ans pour les hommes lorsque cette période est combinée avec leur service militaire), là où le gouvernement les affecte. (Un programme similaire d’un an existe au Mexique, où la formation médicale est gratuite, depuis plus de quatre-vingts ans.) Ce n’est qu’après avoir terminé leur service social que les médecins sont libres de postuler à des postes vacants dans des localités souhaitées et/ou qu’ils considèrent, en termes relatifs, comme des conditions de travail les plus favorables. Pourtant, à partir du moment où ils font leur service social, ils sont considérés comme des employés de l’État (la pratique privée est illégale) et sont soumis aux ordres et conditions dictés unilatéralement par l’État cubain. C’est pourquoi ce système doit être qualifié de médecine étatique par opposition à la médecine socialisée. Ce dernier permettrait, dans un système démocratique et socialiste, aux médecins de choisir de travailler soit pour des organisations sociales non étatiques – comme les syndicats indépendants, les associations de quartier, les conseils ouvriers, les gouvernements municipaux –soit pour l’État, dans le cadre d’un système universel, entièrement financé par les deniers publics.
Sans surprise, de nombreux médecins cubains choisissent de déserter une fois qu’ils servent à l’étranger, malgré les difficultés et les obstacles. Organiser des syndicats indépendants pour contester le système de parti unique de Cuba est très risqué. La plupart des habitants de l’île – médecins compris – n’y pensent probablement même pas ou ne croient pas qu’il s’agisse d’une véritable option. Beaucoup d’entre eux ont pu déserter et obtenir l’asile aux États-Unis dans le cadre du Programme cubain de libération conditionnelle des professionnels de la santé mis en place par George W. Bush en 2006. Ce programme a permis aux médecins cubains en poste dans d’autres pays d’obtenir la résidence permanente aux États-Unis et a facilité leur exercice légal de la médecine après ils soient arrivés dans ce pays. Au moment où ce programme a été aboli par Obama à la fin de sa présidence en janvier 2017, quelque 7000 médecins cubains en avaient profité. Il va sans dire que – comme cela a été le cas avec le blocus économique américain de Cuba établi en 1960 – ce programme n’a pas été créé pour promouvoir le bien-être du peuple cubain ou pour rétablir la «démocratie» dans l’île, mais pour attaquer l’économie cubaine, dans ce cas par l’exacerbation de la «fuite des cerveaux» de l’île, afin de punir un régime qui n’obéit pas aux règles du jeu de Washington.
Il convient également de noter que même si Trump a éliminé de nombreuses mesures d’Obama pour assouplir le blocus, il n’a rien fait pour rétablir le programme médical de Bush, preuve que ses sentiments et sa politique anti-immigrés sont plus forts que son anticommunisme. En l’absence d’évasion permise par le programme de libération conditionnelle des médecins cubains parrainé par les États-Unis, au moins 150 médecins cubains au Brésil ont intenté des poursuites dans ce pays avant l’entrée en fonction de Bolsonaro, contestant l’accord Cuba-Brésil et exigeant d’être traités comme des entrepreneurs indépendants autorisés à gagner un plein salaire, et non en tant qu’employés de l’État cubain. Les poursuites sont devenues sans objet après l’arrivée au pouvoir de Bolsonaro et Cuba a retiré son personnel médical (environ 8000 personnes) de ce pays. En juin 2019, plusieurs centaines de médecins cubains amenés au Brésil ont refusé de retourner à Cuba. Ils sont restés au Brésil en pleine détresse sociale, prenant dans n’importe quel emploi qu’ils pouvaient trouver juste pour survivre, car ils n’étaient pas éligibles pour pratiquer la médecine, sauf s’ils réussissaient un examen qui ne leur a pas été proposé depuis 2017. Cependant, récemment, le gouvernement brésilien a embauché et autorisé 157 médecins cubains à aider au traitement de la crise du coronavirus qui a explosé dans ce pays sous la politique criminelle négligente du gouvernement de Bolsonaro (Al Jazeera, 19 mai 2020)
Pendant ce temps, les Cubains paient leur propre part pour l’exportation des médecins. Dans une étude sur l’économie cubaine entre 2007 et 2017 («Bien-être social et réforme structurelle à Cuba, 2006-2017», Cuba in transition, vol. 27, 2017), l’éminent économiste cubain Carmelo Mesa-Lago a indiqué que si, d’une part, le système de santé universel et gratuit de Cuba a permis des améliorations majeures – comme une nouvelle baisse de la mortalité infantile, la réduction du nombre d’habitants par dentiste [qui, bien qu’importante, n’est cependant qu’une partie des graves problèmes de soins dentaires à Cuba], et une augmentation des vaccinations entraînant l’élimination ou la réduction de la plupart des maladies transmissibles – d’autre part, la mortalité maternelle a augmenté, le nombre de polycliniques et d’hôpitaux a diminué, y compris les hôpitaux ruraux et les centres de santé ruraux/ urbains qui ont été fermés en 2001, les patients étant ensuite dirigés vers des hôpitaux régionaux, ce qui entraîne une augmentation du temps et des coûts de transport et des risques plus élevés dans les cas d’urgence. Il a également constaté que le nombre de lits d’hôpitaux disponibles avait également diminué et que les procédures de diagnostic et de test coûteux avaient été réduites tandis que les installations et équipements physiques continuaient de se détériorer. Outre une grave pénurie de médicaments, a indiqué Mesa-Lago, les patients hospitalisés devaient fournir leur propre approvisionnement en draps, oreillers et articles similaires.
En ce qui concerne spécifiquement l’exportation de personnel médical de Cuba à l’étranger, les résultats de Mesa-Lago indiquent que si le nombre de médecins pour la période 2007-2017 a augmenté de 21%, établissant un nouveau record en 2016 avec 90 161 nouveaux médecins, une fois les 40 000 médecins à l’étranger en 2017 soustraits de ce nombre, le nombre de médecins travaillant sur l’île a été considérablement réduit à 224 habitants par médecin, pratiquement au niveau de 1993, la pire année de la crise économique qui a suivi l’effondrement du bloc soviétique. Le recul a été pire pour les spécialistes, dont une grande partie est partie travailler à l’étranger. (L’auteur connaît personnellement le cas d’une amie dont la coloscopie a été bâclée par un technicien chargé de remplacer un spécialiste envoyé à l’étranger.) Mesa Lago a ajouté que l’exportation de médecins a eu un effet particulièrement néfaste sur le programme concernant les médecins de famille, un programme qui a connu un succés, créé par le gouvernement dans les années 1980, qui a été considérablement réduit de 59 % au cours de la période 2007-2017 de son étude. Les graves problèmes affectant le système de santé cubain causés par la diminution du nombre de médecins à l’intérieur de Cuba ont été aggravés par une baisse de 22% (pas nécessairement associée au programme d’exportation des médecins) d’autres personnels médicaux – techniciens et infirmières – qu’indique Mesa Lago dans cette même étude.
Récemment, le Covid-19 a frappé Cuba comme pratiquement dans le monde entier. Selon Granma, le journal officiel du parti communiste, 1963 personnes auraient été infectées (Granma, 26 mai) et 79 personnes sont mortes (Granma, 19 mai). Au 25 mai, 434 patients étaient hospitalisés (Granma, 26 mai) et 3281 étaient sous observation dans les centres de santé (Granma, 19 mai), mais, chose surprenante, seulement ils étaient toujours 434 une semaine plus tard (Granma, 26 mai), tandis que 1823 étaient suivis à la maison (Granma, 26 mai.) Alors que le gouvernement cubain a pris des mesures drastiques pour stopper la contagion, comme fermer le pays aux touristes et interrompre les transports publics, et il est trop tôt pour évaluer, car il y a très peu d’informations indépendantes, la façon dont le système de santé de Cuba a réussi dans l’ensemble en termes de traitement de ses patients Covid-19 et même l’exactitude des statistiques rapportées ci-dessus.
Beaucoup dans la gauche à l’étranger attribuent les graves problèmes affectant le système de santé cubain, y compris ceux résultant spécifiquement de l’exportation de médecins cubains, au blocus économique américain. Il est incontestable que depuis sa création en 1960, ce blocus a eu un impact significatif sur l’économie cubaine. Bien qu’adouci par Obama lors de son deuxième mandat, la plupart de ses changements positifs ont ensuite été annulés par Trump: limitation des voyages des États-Unis vers l’île, restrictions des envois de fonds et réaffirmation de la fermeture du marché américain aux produits cubains et interdiction des investissements américains à Cuba. Ces interdictions ont en fait été renforcées par Trump qui a gelé de nouveaux investissements étrangers à Cuba lorsqu’il a appliqué pour la première fois le titre III de la loi Helms-Burton de 1996 qui interdit toute transaction économique impliquant des terrains ou des installations qui ont été confisqués aux entreprises américaines par le gouvernement cubain au début des années 1960 et accroît les sanctions à l’encontre des banques internationales qui effectuent des transactions avec Cuba.
Bien que la loi américaine de 2000 sur les sanctions commerciales et l’amélioration des exportations, toujours en place, autorise la vente de produits alimentaires et de la plupart des médicaments à Cuba, elle crée de nombreuses difficultés pour les transactions commerciales liées à la vente de ces produits sur l’île, telles que le paiement en espèces par avance (aucun crédit bancaire n’est accepté) et obtention de tant de licences qu’elle sape l’objectif prétendument libéralisateur de cette loi.
Il convient de noter, cependant, que seuls les États-Unis ont boycotté Cuba et que de nombreux autres pays capitalistes, en particulier le Canada, l’Espagne (y compris l’Espagne de Franco) et de nombreux pays de ce qui est devenu l’Union européenne, ont maintenu des relations économiques. Les relations avec l’île leur offrent un large éventail d’opportunités économiques depuis le tout début du blocus. Par conséquent, le blocus américain n’explique les problèmes de Cuba que dans une mesure limitée. Le rôle de l’économie politique bureaucratique cubaine non démocratique dirigée par un État à parti unique est beaucoup plus important.
Dans tous ses éléments essentiels, Cuba est une réplique du modèle socio-économique et politique soviétique, où une classe bureaucratique dirige l’économie sans aucun apport ou contrainte institutionnelle de la part de syndicats indépendants ou de toute autre organisation populaire. Ce n’est que sur Internet auquel seule une minorité de l’île a accès principalement en raison de son coût très élevé par rapport aux salaires existants, et que le gouvernement n’a pas encore été en mesure de contrôler totalement, que l’on peut trouver de nombreuses voix critiques cubaines, y compris celles exprimées dans les associations indépendantes naissantes de la société civile qui sont complètement exclues par les médias de masse contrôlés par l’État (journaux, chaînes de télévision et radio). Il n’y a donc pas de transparence et de débat public ouvert sur les problèmes de Cuba – qu’ils soient politiques, sociaux ou économiques – à moins que le régime ne choisisse de les faire connaître à ses propres fins et surtout tant qu’il les contrôle. Les informations sur l’économie sont systématiquement faussées, et la transmission des signaux clairs nécessaires au bon fonctionnement de l’économie est continuellement bloquée: des informations fiables, des informations précises et des initiatives indépendantes d’en bas sont systématiquement découragées de peur de perdre le contrôle de l’État à parti unique. En l’absence d’une vie publique ouverte et démocratique, les citoyens n’ont pas le pouvoir de faire rendre compte aux planificateurs. L’absence d’une presse libre et de tout moyen indépendant de communication de masse facilite les dissimulations à l’échelle du système, la corruption et l’inefficacité. Le manque de démocratie favorise également l’apathie et le cynisme parmi les travailleurs qui n’ont pas de contribution indépendante significative, et encore moins de contrôle sur ce qui se passe sur leur lieu de travail.
Cette inefficacité et cette corruption se reflètent dans tous les secteurs de la société cubaine, y compris le secteur de la santé. Il y a dix ans, l’Uruguayen Fernando Ravsberg, journaliste critique nullement hostile au système cubain, écrivant sur les hôpitaux de Cuba, déplorait le gaspillage d’équipements coûteux d’ophtalmologie laissés à l’abandon, inutilisés, dans divers entrepôts; des déchets de la nouvelle unité de brûlage du célèbre hôpital de Calixto Garcia, à côté du campus principal de l’Université de La Havane, qui n’avait pas été utilisé pendant une seule journée depuis son inauguration deux ans plus tôt. Les installations là-bas étaient de toute façon inutilisables, a noté Ravsberg: le toit s’était effondré à plusieurs reprises, et les baignoires très coûteuses pour les personnes brûlées ne pouvaient pas être utilisées en raison de la faible pression de l’eau. De même, la nouvelle salle d’opération ultramoderne de cet hôpital était inutilisable en raison de nombreuses fuites dans les conduites d’eau et d’un toit qui fuyait chaque fois qu’il pleuvait. Les carreaux continuaient à se décoller des murs, en raison du manque de ciment, qui avait probablement été volé pendant la construction, comme cela s’était produit à l’hôpital d’Almejeiras, dans le centre de La Havane («Los Recursos de Salud», Cartas desde Cuba, 29 avril , 2010).
Tout en admettant que le régime cubain est antidémocratique, voire économiquement inefficace et «parfois» répressif, de nombreuses personnes de gauche, outre qu’elles doivent s’opposer à l’intervention américaine à Cuba, considèrent le régime cubain comme progressiste méritant leur soutien en raison de son objectif de sortie du peuple cubain de la pauvreté et de ses efforts pour y parvenir par le biais de son système d’éducation publique, y compris la formation professionnelle, et d’un système de soins de santé garanti. Cette position implique un calcul arithmétique des gains et des pertes où les gains de bien-être social compensent largement la perte de démocratie et de liberté politique. Pourtant, le bien-être d’un peuple est intrinsèquement lié à la présence ou à l’absence de démocratie. Ce qui s’est produit avec le système de santé en est un exemple. L’impact que l’exportation de médecins a eu sur l’aggravation des problèmes existants dans ce secteur est plus spécifique.
Il y a une perte qui ne peut être tolérée lorsqu’il s’agit de savoir si un régime particulier doit être soutenu politiquement: la perte du sens de classe, de groupe (qu’il soit défini par la race, le sexe ou l’orientation sexuelle) et l’autonomie politique individuelle, et la perte de liberté à s’organiser de manière indépendante pour défendre les intérêts de classe ou d’autres groupes, ainsi que celle des libertés civiles et politiques associées pour rendre cette indépendance organisationnelle possible et viable. (Article publié sur le site New Politics, le 30 mai 2020, traduction Patrick Le Tréhondat)
Article publié sur À l’encontre.