Nous relayons l’appel du Collectif.e.f 8 maars-Bruxelles pour l’organisation d’un 1er mai féministe. Cet appel s’inscrit dans la construction d’un mouvement féministe pour les 99% au niveau international. En ces temps qui montrent clairement que les femmes sont en première ligne de toutes les activités essentielles et des réseaux de solidarité, il est vital de s’organiser pour forcer un changement de cap radical. Ce que la société a de plus précieux c’est le soin, la solidarité, les liens, la culture, l’enseignement, … ce sont ces activités qui doivent être mises au centre de l’organisation économique et sociale.
Le 8 mars dernier des millions de personnes se sont mobilisées dans la rue pour dénoncer la violence faite aux femmes*, la précarisation des conditions de vie des femmes* des classes populaires et l’invisibilisation de leur travail productif et reproductif pourtant essentiel au maintien de nos sociétés.
Aujourd’hui plus que jamais, la crise sanitaire et économique déclenchée par le COVID-19 met en évidence et accélère des phénomènes que le mouvement féministe dénonce depuis longtemps. Les formes de travail exercées par les femmes ne souffrent pas juste de l’invisibilisation et de la violence patriarcale et raciste, mais aussi de la violence néolibérale qui les précarise financièrement. La majorité des secteurs essentiels sont caractérisés par une instabilité des contrats de travail, par un manque d’encadrement social, fragilisés, niés. Travail reproductif, care, charge mentale, double journée de travail, inégalités ne sont pas de simples mots. Derrière eux, il y a des visages, des noms, des voix, des corps de femmes*, qui sont doublement (voire triplement) exploitées. La violence machiste ne se trouve pas seulement entre les murs domestiques : elle s’insère et s’exprime organiquement aussi dans l’appareil économique, institutionnel, policier et colonial. Tous ces niveaux se nourrissent mutuellement et ce sont nos corps qui payent le prix de cette exploitation !
A l’occasion de la date historique du Premier mai, qui unit les travailleurs et les travailleuses du monde entier dans la lutte pour la reconnaissance et la mise en œuvre de leurs droits, nous, le Collecti.e.f 8 maars Bruxelles lançons notre l’appel international pour un Premier Mai féministe, lancé de manière unitaire par des collectifs féministes de plusieurs pays du monde.
Dans ce contexte de crise sanitaire, nous constatons que :
Le travail domestique et de soin aux personnes devient central pour contrer la crise : sans ce travail la société périrait tout simplement. Toutes ces tâches vitales, toujours invisibles et exploitées, ont aujourd’hui la centralité politique qu’elles méritent. Pourtant les conditions de travail restent précaires, que ce soit en termes de droits ou de protection.
En Belgique, trois quarts du personnel sanitaire est composé par des femmes. Iels dénoncent depuis plus d’un mois la pénurie de matériel et de protection et insistent sur le fait que leur vie ne peut pas être mise en danger. Quant aux aides-ménagères, pour la quasi totalité femmes d’origine immigrée, elles restent sous-payées, le plus souvent mal considérées. Presque toujours la santé de celles qui sont obligées de continuer à travailler n’est pas protégée.
Le confinement augmente également les violences conjugales contre les femmes et les personnes LGBTQI+. Le confinement, ainsi que la gestion autoritaire et policière de celui-ci par l’Etat est idéalisé comme étant un espace « safe » alors qu’on oublie que pour beaucoup la maison et l’espace privé ne le sont pas puisque cela équivaut à rester isolée avec son propre agresseur.
Les politiques gouvernementales oublient également ceux et celles qui n’ont pas une maison (les personnes sans abri, les migrant-e-s non régularisé-e-s), ceux et celles qui vivent dans des conditions de détention inhumaines (centres fermés, prisons etc.) et sans les mesures de protection nécessaires mais aussi ceux et celles qui vivent dans des logements précaires ou insalubres où le virus prolifère plus facilement. Pour toutes ces catégories la violence de tous les jours est accrue.
Comment faire en sorte que l’État prenne en charge ces problématiques ?
Nous pensons que cette crise peut être une occasion pour exiger un changement réel de société et nous ferons de notre mieux pour lutter dans ce sens :
- Nous exigeons une politique de responsabilité économique face à la pandémie : nous ne sommes pas disposées à accepter une fois de plus que les grands actionnaires soient sauvés et qu’en même temps celleux qui ont perdu leur travail ou qui ne l’ont jamais eu se retrouvent sans revenu ou soient obligé-e-s de s’endetter pour survivre. La richesse doit être redistribuée maintenant et ne doit plus être l’apanage d’une minorité privilégiée ;
- Nous refusons de revenir à la normalité néolibérale dont l’insoutenabilité est indéniablement révélée dans cette crise. Alors qu’aujourd’hui, plus que jamais, la santé et la vie s’affirment comme des questions collectives et politiquement centrales, les politiques néolibérales prêchent une logique de responsabilité individuelle de gestion : travailler plus dans l’avenir pour récupérer les profits perdus et faire encore plus de cadeaux à ceux qui sont déjà riches ;
- Nous ne nous plierons pas à l’isolement et l’individualisme parce que nous ne pouvons pas le faire. Soit nous sortons de cette crise ensemble, soit personne ne le fera ;
- Ce que la grève féministe mondiale nous a appris, c’est que c’est lorsque nous sommes ensemble que nous sommes fortes. Maintenant plus que jamais nous devons nous mobiliser ensemble afin d’éviter la fragmentation que la pandémie nous impose.
# Aujourd’hui chez nous, demain dans la rue !
Lors de la Journée internationale des travailleurs et des travailleuses, nous crierons toute notre colère contre la violence d’une société qui nous exploite, nous opprime et nous tue. Nous ferons cela dans les modalités exigées par le confinement, mais nous ne renoncerons pas au droit de nous battre pour une société plus juste, sans violences patriarcales, racistes, coloniales et sans exploitations capitalistes.
Plus jamais la production d’un avion de chasse ne primera sur celle d’un respirateur, plus jamais les sauvetages bancaires ne primeront sur les investissements dans la santé et l’éducation, plus jamais les enseignant-e-s, les médecin-e-s, les aide-ménagères ne gagneront moins que des investisseurs. Plus jamais les emplois ne seront au service de la mort, plus jamais les responsables des banques ou des entreprises meurtrières ne décideront de notre avenir.
Nous désignerons les coupables de cette crise, qui devront en payer le prix !
Nous voulons une sortie féministe de cette crise et nous ne voulons pas revenir à la normalité puisque la normalité signifie inégalités, violences et exploitation!