Je ne sais pas si c’est un effet du confinement, mais il y a en ce moment un foisonnement de bonnes idées pour nous permettre de sortir du marasme.
Dans sa rubrique « Popote de crise », l’Echo nous livre ce samedi(1)Lire : https://www.lecho.be/dossiers/coronavirus/Comment-payer-la-facture-de-la-crise/10220154?utm_campaign=WEEKEND&utm_medium=email&utm_source=SIM les recettes novatrices de quelques-uns des plus grands experts ès-crisis. Et leur pose la question « Quelles sont les options pour renflouer les caisses ? Comment payer la facture de la crise ? »
Avant de nous livrer leurs recettes, les experts constatent d’abord l’état du frigo : « En postulant un confinement de sept semaines, ils estiment que le produit intérieur brut (PIB) belge, soit la richesse créée, pourrait se contracter de 8% en 2020, avant une reprise relativement rapide en 2021 (+8,6%). En euros, cela donne une perte de PIB de « près de 30 milliards d’euros à fin juin 2020, 45 milliards à fin décembre et près de 60 milliards à fin 2021 ».
Fichtre ! se sont dit les experts ès-capitalismus, « il va falloir être inventifs si on ne veut pas toucher aux réserves qu’on a planquées dans les paradis fiscaux ». Et ils se sont mis à compulser leur livre de cuisine favori, « L’art d’accommoder les restes – dédié aux petites fortunes- ». Un bouquin pareil, presqu’aussi ancien que l’exploitation capitaliste, les a conduits vers des recettes qui ont déjà fait leurs preuves.
Le premier a dit : « Il ne faut pas ouvrir aveuglément le robinet de la dépense publique », (Geert Noels – Econopolis). « Mais a-t-on d’autres choix, aujourd’hui, que d’ouvrir le robinet en grand ? « Il faut arrêter de dire en boucle qu’on n’a pas le choix. C’est fataliste, facile et démagogique. Ce n’est pas responsable vis-à-vis des générations futures. Oui, on peut faire des choix et utiliser l’argent public avec discernement. Cela demande du courage politique. ».
C’est la crise, messieurs-dames, et d’ailleurs on vous le disait déjà avant la crise : l’état dépense trop, qui a besoin d’autant de services publics ? Qu’on privatise les services rentables et le reste on peut fermer !
Le deuxième expert constatant que le premier s’énerve et a laissé ouvert le robinet à l’eau chaude, essaie une nouvelle piste : « Pour sortir de la crise, il faut deux éléments » Jean Hindriks (UCLouvain, Itinera). « Le premier, c’est l’émission de dettes publiques pour apporter de la liquidité. (…) Mais il ne suffit pas de relancer la demande. Mettre de l’essence dans le réservoir c’est bien, encore faut-il que le moteur tourne. Il faut donc aussi relancer l’offre, la production, notamment… »
Les autres experts sont tous d’accords : « Pour Bruno Colmant (ULB, UCLouvain), « la seule voie possible pour financer le coût de cette crise, c’est la monétisation : l’émission de dette par les États et rachetée par la Banque centrale européenne (BCE), qui la détiendra très longtemps, pour ne pas dire à perpétuité. L’État belge pourrait ainsi émettre un grand emprunt corona, assorti d’un avantage fiscal (précompte réduit à 15% par exemple), et récolter 10 milliards d’euros, voire plus ».
Bon sang, mais c’est bien sûr ! « La réponse est monétaire », approuve Eric Dor. « La BCE va racheter massivement des obligations publiques pour soutenir les pays dans leurs efforts de retour à la normale. Pourront-ils un jour se défaire de cette dette ? Je crois plutôt que cette dette va rester coincée très longtemps dans leur bilan. Le parapluie monétaire n’est pas près de se refermer. » Mais est-ce soutenable de s’endetter plein pot ? Oui, répond Étienne de Callataÿ (UCLouvain, UNamur). « Évidemment, s’endetter revient à transférer la facture aux générations suivantes. C’est pour votre pomme, les enfants, débrouillez-vous ! « Oui, mais quelle est l’alternative ? », demande Étienne de Callataÿ. « Pour une fois, ce n’est pas de l’égoïsme de la part de la génération actuelle. C’est un choc conjoncturel majeur qui implique de dépenser plus pour s’en remettre. »
« A propos de cette génération actuelle, il faudrait quand même lui demander une petite contribution, non ? » s’interrogent les experts. Il y a cette piste avancée par Eric Dor. On pourrait la soumettre à l’impôt de crise : « Selon leur secteur d’activité, des gens ont gardé 100% de leur salaire, d’autres pas. Les premiers épargnent de manière forcée, puisque les occasions de consommer sont rares avec le confinement, les seconds ne le peuvent pas. Ce n’est pas lié au mérite des uns et des autres, c’est arbitraire. Le cuisinier d’un restaurant ne peut plus travailler, l’employé de banque oui. Est-ce normal ? La solidarité devrait jouer. »
« Oh, oui ! » acquiesce de Callatay qui a une autre idée pour épicer le plat : « C’est peut-être inaudible aujourd’hui, mais réfléchissons à ceci. Notre économie aura été à l’arrêt pendant deux mois, ne serait-il pas logique que nous partions tous à la retraite deux mois plus tard, au titre d’effort collectif et solidaire face au choc majeur subi ? Faire un effort, cela peut aussi être offrir du temps à la collectivité. »
Une cuisine infecte
Vous avez compris que les « restes » que veulent accommoder ces vieux croutons, c’est nous tous. Ils essaient de nous monter les uns contre les autres et surtout de préserver le capital qui lui n’a pas à faire preuve de solidarité. Pensez-vous que c’est au tour des grandes entreprises qui ont continué à turbiner à plein régime et profitent de la crise – tout en rechignant à équiper leurs travailleurs des protections nécessaires – de se montrer solidaires des petits commerces et de l’Horeca ? Que nenni, pour eux, ce sont les « égoïstes » qui ont travaillé à temps plein pendant que les autres étaient contraints au chômage temporaire qui doivent passer à la caisse. Peut-être faudrait-il leur rappeler que c ’est avec les cotisations sociales des travailleurs qu’on paie le chômage temporaire. Et que de nombreux cas ont été rapportés où des employeurs opportunistes ont mis en chômage temporaire des travailleurs qui avaient rentré un certificat médical (infectés par le Coronavirus ?), afin d’échapper au paiement du salaire garanti.
Ce qu’ils veulent sauver, ce ne sont pas des vies, c’est leur foutu système qui pour extirper de notre travail des montagnes de fric nous exploite tous, détruit nos vies, empoisonne la planète,
Alors, messieurs les experts, arrêtez de nous donner vos leçons de solidarité. La vôtre est à sens unique.
fRED
Notes