Les caractéristiques de la crise en cours, de même que les développements pratiques et théoriques des dernières années, ont permis un dialogue fécond entre deux des courants théoriques les plus importants des deux derniers siècles, le féminisme et le marxisme. Après un passé fait de mariages et de ruptures, il semble qu’on assiste à leur réconciliation. Dans la dernière décennie, la littérature s’inspirant de ces deux courants a redécouvert et tenté de dépasser certains des débats historiques qui ont marqué leur relation. Il est certain que la croissance massive du mouvement féministe y a contribué. Du côté du marxisme, il n’est pas étonnant que la période récente ait vu un renouveau à la fois académique et militant : les séminaires universitaires se multiplient, les travaux des penseurs classiques ont été réédités, etc.
Le désordre global et les expériences de crise systémique que nous avons connus dans la dernière décennie (crise économique, crise de la légitimité politique, crise de la reproduction sociale, crise liée aux limites de la planète) ont entrainé un besoin de comprendre qui ne peut être satisfait par des analyses partielles mais nécessite une théorie globale. Le marxisme apparaît alors comme cette vieille vérité qui a finalement survécu à la crise des grands récits historiques et démontré, une fois encore, sa pertinence dans la situation actuelle et sa précision en tant qu’outil analytique.
Plutôt que d’adopter une approche exhaustive, qui dépasse évidemment les limites de cet article, nous avons décidé de nous concentrer sur certains des nœuds que nous considérons comme centraux et stratégiques pour un réarmement théorique et politique : les débats concernant la reproduction, le travail et la classe, mais aussi la volonté de comprendre le rôle du mouvement féministe, de même que celui des luttes environnementales, dans la reconstruction d’un horizon émancipateur dans le chaos du capitalisme.
Les débats concernant la reproduction
Dans les années 1970, les féministes de la deuxième vague, élevées dans l’idée que le privé est politique, commencèrent à se concentrer sur la question de la reproduction. C’était une période complexe, marquée par la crise pétrolière et des attaques violentes contre les conquêtes de la classe ouvrière durant l’après-guerre. Dans cette période de développement puis de consolidation d’un nouveau type de capitalisme (le néolibéralisme) se produisit une transformation substantielle du marché du travail, du rôle de l’Etat et de la distribution du temps et du travail, avec un impact important sur les modalités de construction de l’identité de genre. Si on se concentre sur les pays du « global North », où les féministes de la deuxième vague agissaient et écrivaient, on trouve les phénomènes suivants, qui se croisent :
- Les destructions d’emplois dans les secteurs traditionnellement réservés aux hommes, tels que les mines et l’industrie lourde
- Une augmentation du taux d’exploitation and une baisse généralisée des salaires, si bien que le soi-disant salaire familial qui permettait à certains secteurs de la classe ouvrière de couvrir les besoins vitaux des travailleurs masculins et de leur famille, en maintenant les femmes dans le rôle de femmes au foyer, a presque totalement disparu.
- L’entrée massive des femmes sur le marché du travail, afin de compléter les revenus désormais réduits du mari grâce à un salaire d’appoint ou pour permettre leur accès à une vie autonome grâce à leur indépendance économique
- Le rejet, par des secteurs non-négligeables de la population féminine, du poids des tâches domestiques, associé à la recherche d’un développement personnel s’appuyant sur des formules traditionnellement liées à l’identité masculine : carrière professionnelle, succès économique etc.
Suivant la voie ouverte par l’ensemble de la production théorique produite par la deuxième vague du féminisme autour de la politisation et de la problématisation sociale des rôles genrés, des relations personnelles et de la question sexuelle, une série de débats ont eu lieu que l’on peut situer entre la discussion concernant le travail domestique et la problématisation de la reproduction. Ces débats étaient basés sur des innovations qui font aujourd’hui partie du bon sens féministe mais qui n’étaient encore qu’esquissées il y a 50 ans : le fait que le travail gratuit effectué par les femmes à leur domicile est essentiel pour la survie sociale, l’idée que le fait de considérer que le travail et l’emploi sont un seul et même phénomène empêche de politiser le travail domestique, et que l’articulation de la lutte politique uniquement à travers le conflit capital/travail exclut une partie importante de la classe, essentiellement des femmes. Pour le dire schématiquement, deux préoccupations motivaient ce travail de réflexion.
D’une part, la volonté d’établir qui bénéficiait du travail gratuit effectué par les femmes, et qui, dès lors, était l’ennemi principal. Pour Christine Delphy et celles qu’on appela les féministes matérialistes, ce sont les hommes qui exploitaient économiquement les femmes par le biais du contrat de mariage, configurant par là un mode de production domestique indépendant du mode de production capitaliste (Delphy, 1976). Cependant, Mariarosa Dalla Costa et d’autres féministes formées au marxisme issues de courants autonomistes expliquaient que les vrais bénéficiaires du travail domestique étaient le patronat et l’Etat (Dalla Costa 2009 : 21-52). Même si les deux positions se prononçaient pour l’autonomie du mouvement féministe, la différence politique était fondamentale : les matérialistes conceptualisaient les femmes comme classe, décrivaient l’exploitation patriarcale comme une exploitation unifiant leurs vies et considéraient la lutte contre le patriarcat et la classe des oppresseurs (les hommes) comme la tâche prioritaire ; les marxistes tenaient compte de l’appartenance de classe comme facteur différentiel dans l’expérience concrète de l’oppression de genre et, en plus de défendre l’autonomie du mouvement féministe, étaient favorables à la participation des femmes à la lutte des classes (Pérez Orozco, 2014 : 49-73).
Pour les féministes qui se définissaient comme marxistes et qui considéraient qu’il fallait penser le travail domestique au sein du système capitaliste dans son ensemble, la deuxième préoccupation fondamentale renvoyait à la caractérisation de ce travail : s’agissait-il ou non d’un travail produisant de la force de travail comme marchandise ? Ou, ce qui revient au même, le travail domestique produit-il de la plus-value ? Nous n’entrerons pas dans les détails de ce débat, qui s’est finalement retrouvé pris dans des discussions théoriques qui n’ont débouché sur rien, mais il est utile d’y faire référence parce que cela nous permet de comprendre comment les féministes marxistes tentaient d’étendre l’analyse de Marx pour y inclure la sphère domestique, en concevant le travail domestique des femmes comme un objet soumis à une étude critique spécifique.
La contribution la plus intéressante et la plus solide sur le plan théorique est arrivée quelques années après, avec la publication de Le Marxisme et l’oppression des femmes. Vers une théorie unitaire, de Lise Vogel, en 1983. Vogel se basait sur les considérations d’Iris Young qui, quelques années plus tôt, avait souligné comment l’étude des relations patriarcales en tant que constituant un système différent, bien que profondément lié au capitalisme, permettait au marxisme de conserver intacte son analyse des rapports de production tout en traitant l’oppression des femmes comme un simple ajout. A l’opposé, Young défendait la nécessité de conceptualiser la différenciation de genre comme un élément de la formation capitaliste, en faisant l’effort de développer une théorie unitaire de la production et de la reproduction capitaliste (Young, 1981). C’est le travail que Lise Vogel a choisi de poursuivre, avec deux contributions fondamentales qui sont à la base de deux développements théoriques du féminisme contemporain.
En premier lieu, Vogel rompt avec les explications fonctionnalistes qui conçoivent le travail comme uniquement nécessaire à la reproduction du capitalisme et affirme que l’origine de l’oppression de genre sous la domination du capital n’est pas la division sexuelle du travail mais la nécessité d’assurer la reproduction sociale. Cette théorie de la reproduction sociale est actuellement développée avec beaucoup de perspicacité notamment par Tithi Bhattacharya (2017). Deuxièmement, à propos du débat des années précédentes, Vogel affirme que le travail domestique ou reproductif ne génère pas de plus-value puisqu’il ne produit pas de valeur d’échange, mais des valeurs d’usage. Cela n’enlève rien à son importance sociale, mais nous permet de comprendre qu’en un sens le travail reproductif est un type de travail spécifique avec ses propres caractéristiques. Et par l’évolution de ce terme (travail domestique/travail reproductif) on arrive à l’un des concepts fondamentaux du courant connu comme l’économie féministe : le travail du care
L’économie féministe reprend, consciemment ou non, l’idée de Vogel selon laquelle le travail domestique est un travail différent de celui qui, bien qu’impliquant les mêmes tâches et activités, produit les valeurs d’échange offertes sur le marché. Qu’est-ce qui différencie le travail d’une cuisinière dans un restaurant de ce que la même femme peut faire chez elle ? Le courant de l’économie féministe répond que bien qu’il s’agisse de travail reproductif dans les deux cas, le second relève aussi du travail du care. Le travail du care est compris comme une activité définie précisément par la relation et l’implication émotionnelle qu’elle implique ; quand cette même activité est réalisée sur le marché, elle perd cette implication et incorpore un autre type de relation humaine (celle de la marchandise). L’économie féministe redéfinit le conflit entre vie et capital et désigne les « carers » comme les garant.es de la reproduction sociale. Sa volonté politique, comme nous le verrons plus loin, est de pousser vers une réorganisation du travail et du temps qui rompe avec les dynamiques d’accumulation et mette la vie au centre.
Près de cinq décennies de débats à propos de la reproduction ont établi certaines idées, bien que dans une version simplifiée et dénuée de complexité théorique, dans le patrimoine commun du féminisme : l’importance sociale du travail gratuit des femmes, le recours à ce travail en temps de crise, son lien avec la précarité féminine et la pauvreté spécifique des femmes, etc. C’est ce qui est apparu au premier plan avec les grèves féministes : la revendication de l’importance de ce rôle social et la conscience de la force politique qu’il nous donne. Il ne s’agit pas de simples mobilisations sectorielles mais de processus qui, dans leur développement, transforment et mettent à jour les conceptions spécifiques du travail et de la classe.
Mettre à jour le concept de travail
Comme nous l’avons vu, sous le néo-libéralisme, le travail a connu une profonde transformation à l’échelle mondiale, qui n’est évidemment pas homogène à l’échelle régionale ou internationale. Dans le « global North », cette transformation a cependant été marquée dans les dernières décennies par ce qu’on appelle la féminisation de la main d’œuvre, communément utilisée pour expliquer deux phénomènes qui se produisent souvent de manière simultanée. D’une part, elle a été utilisée pour expliquer l’entrée massive des femmes sur le marché du travail, avec les conséquences déjà mentionnées et les effets sur les débats du féminisme des années 1970. Mais ce concept a d’autre part été utilisé pour expliquer le processus par lequel les conditions qui ont historiquement été celles des femmes de la classe ouvrière ont été généralisées à des couches importantes du salariat. Travail temporaire, haut niveau de turn over, manque de stabilité, revenus complémentaires, secteurs marqués en pratique par une absence de droits, travail informel et bien plus encore sont les conditions qui configurent aujourd’hui l’organisation du travail salarié dans notre société. Bien sûr, ce processus à large échelle reconfigure non seulement les formes d’exploitation mais aussi les conditions du travail reproductif et, de manière générale, les conditions de vie et leur viabilité.
Ces considérations ont des implications à la fois théoriques et stratégiques. Ces formes de travail, loin d’être un sous-produit pré-capitaliste ou un sous-produit de formes antérieures du capitalisme, sont des formes constitutives du capitalisme qui génèrent toujours des marges. Le travail temporaire, formel et informel, parmi d’autres formules, constitue un domaine de l’exploitation que certains considéreront comme étant aux marges du marché du travail mais qui est aujourd’hui en passe de devenir la règle et plus l’exception. Il y a eu en même temps un processus de marchandisation des activités qui jusque là étaient restées hors du marché du travail, même si elles ont toujours relevé du travail au sens large, comme le soin des personnes âgées ou la procréation elle-même. Parce que les marges deviennent la règle, ou du fait du processus de marchandisation du travail reproductif, on constate que la séparation artificielle entre le productif et le reproductif, de même que la frontière entre le salariat et le travail du care, sont brouillées. C’est peut-être ce qui a permis une expansion théorique du concept de travail dans le marxisme contemporain, concept qui est longtemps resté dominé par les biais les plus économicistes.
En plus des implications théoriques, ces considérations pourraient avoir des conséquences stratégiques. Ainsi, nous affirmons que les grèves féministes et les grèves de femmes peuvent être considérées comme une expérience majeure pour penser l’organisation des femmes mais aussi de la masse de la classe ouvrière. Judith Carreras (2018) fait référence dans un article récent à une citation pertinente de Mariana Montanelli : « Les perspectives féministes constituent un point de vue privilégié pour analyser les conditions de l’exploitation contemporaine ». On pourrait ajouter qu’elles constituent un point de vue privilégié pour l’expérimentation de nouvelles formes d’organisation et de lutte.
Après des décennies d’alliance et de concertation avec le syndicalisme, le mouvement féministe est en train de permettre un processus de démocratisation de la grève qui pourrait avoir des conséquences à long terme. Les deux derniers 8 mars ont permis à une couche non négligeable de travailleuses de faire et d’organiser une grève, souvent pour la première fois de leur vie. La confiance en soi, « l’empowerment », l’expérience accumulée et les réseaux mis en place par des milliers de femmes peuvent constituer un saut qualitatif pour l’ensemble de la classe, qui ne pourra être évalué que sur le temps long. L’autre élément de démocratisation est l’organisation de la grève dans des métiers traditionnellement oubliés par le syndicalisme réformiste, comme le care ou la consommation, qui ont pourtant été importants dans le mouvement ouvrier au début du 20e siècle : les grèves à propos du coût de la vie ou des loyers en sont un bon exemple. En ce sens, la démocratisation de la grève nous permet d’expérimenter cet outil dans les marges du marché du travail que nous avons mentionnées ci-dessus, et renforce l’idée que ces activités sont avant tout du travail.
Mettre à jour le concept de classe
Le retour de la question des classes est lié à tout ce que nous venons d’évoquer, mais contient toutefois des points aveugles qu’il faut régler en incorporant des appréciations du concept de classe venues du marxisme critique mais aussi de la pensée anti-raciste et du féminisme. Si nous ne le faisons pas, nous reproduirons à nouveau des débats stériles à propos de la lutte des classes comme sujet mythique, absolu et intouchable. Sous cette forme, son existence matérielle et historique est douteuse, et les débats, qui renvoient davantage à un fétiche esthétique qu’à une compréhension des dynamiques sociales, se terminent inévitablement en confrontation avec les luttes réelles. Mais si nous comprenons au contraire que la classe est toujours le résultat du processus des luttes et qu’elle n’existe pas isolément mais dans sa relation antagonique avec l’autre classe (ou, dit autrement, que la lutte des classes précède la classe, et que la classe et la conscience de classe sont toujours les dernières phases du processus historique réel – Thompson 1984), les possibilités qui s’ouvrent sont nombreuses et fécondes.
Non seulement la définition historique ou heuristique de la classe proposée par Thompson s’éloigne d’une vision extrêmement problématique qui se révèle statique dans son usage politique, mais elle est compatible avec les idées développées par les théoriciens de la reproduction sociale et nous permet de comprendre un des aspects fondamentaux du féminisme marxiste auquel nous nous identifions : l’idée que la classe s’articule selon des modalités spécifiques avec la réalité concrète, que les processus d’accumulation se déploient à travers les mécanismes du genre, de la race etc, et que ces phénomènes ne peuvent être séparés de l’expérience de la dépossession parce qu’elles se situent en son cœur. Il n’y a pas de capitalisme qui soit aveugle au genre ou à la race, de même qu’il n’y a pas de classe qui puisse s’abstraire du genre et de la race. La perspective matérielle qu’apporte le féminisme nous permet donc de comprendre la manière dont les différentes expériences de classe (comme exploité.es ou des exploiteu.r.ses) s’incarnent dans des corps concrets, situés historiquement, et nous fournit par là une vision globale de la lutte des classes.
Il est évident que cette interprétation nous sépare des théories qui, se revendiquant également du marxisme, partent d’une conception statique de la classe, donnée a priori avant toute expérience historique, et que l’ajout du genre ou de la race déforme ou modifie en tant sujet mythique originel. Mais elle nous sépare aussi des lectures post-modernes de l’intersectionnalité qui se limitent à « additionner les oppressions », qui demeurent des systèmes distincts qui parfois se croisent ou se mélangent (Ferguson et McNally, 2017). Le fait d’intégrer des phénomènes comme le racisme ou l’hétéro-sexisme dans un cadre analytique unique nous permet non seulement d’affirmer, avec Himani Bannerji (2005), que le tout est plus grand que la somme des parties, mais aussi de nous concentrer sur l’influence que cela exerce dans la construction historique de la classe.
L’énorme expansion du mouvement féministe à laquelle nous assistons depuis quelques années à l’échelle mondiale et la discussion sur l’émergence ou non d’une 3e vague féministe ont remis la classe au centre des débats. Qu’est-ce qui relie ce mouvement massif à la lutte des classes, demandent certain.es ? Selon nous la question est mal posée, et renvoie à une conception statique de la classe, qui ne peut envisager le féminisme que comme un ajout extérieur. L’utilisation de l’arme de la grève, la centralité des luttes pour la reproduction sociale, l’aspiration à penser ensemble les processus de production et de reproduction, et sa fonction de vecteur de politisation et de radicalisation de masse font de la 3e vague du féminisme en tant que telle un processus de subjectivation de classe. Et c’est ainsi parce que partout dans le monde le mouvement féministe redéfinit les antagonismes et devient une lutte de classes féministe (Arruzza, 2018). Le potentiel des femmes pour remplir ce rôle n’est pas lié à une nature féminine mais à notre rôle dans le processus de reproduction sociale, qui fait correspondre nos intérêts avec ceux de l’humanité (Facet, 2017).
A celles et ceux qui remettent en cause cette évidence parce que le phénomène serait partiel ou trop inhabituel, nous, féministes, répondons « qu’aucun modèle ne peut indiquer ce que la véritable formation de classe devrait être à un moment précis du processus. Il n’est pas de formation de classe dans l’histoire qui soit plus vraie ou plus réelle qu’une autre, et la classe se définit elle-même dans sa réalité effective » (Thompson, 1984 : 38-39).
Notes pour un réarmement émancipateur
Il reste vrai qu’il est plus facile aujourd’hui d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme, ce qui n’est jamais qu’une façon très graphique d’exprimer l’effondrement d’un horizon émancipateur après la défaite du 20e siècle. Pourtant, les réflexions éco-socialistes ainsi que les expériences et les réflexions féministes contribuent à un début de reconstruction d’un tel horizon. Un horizon lointain qui maintient des continuités et des discontinuités avec les expériences révolutionnaires et émancipatrices du 20e siècle et constitue aussi un terrain d’affrontement avec des fractions des classes dirigeantes qui cherchent à donner à leur propre projet une tonalité féministe et écologiste dans le but de résoudre la crise de la gouvernance néolibérale.
En raison des dangers des tentatives néolibérales, il faut repérer quels éléments ont plus de potentiel dans le nouveau cycle de mobilisation ouvert ces dernières années. Il faut réfléchir à la manière dont le féminisme s’approprie des slogans comme la division du travail – ou plutôt des travaux – la réduction massive de la journée de travail en raison de la socialisation du travail reproductif, à comment il s’interroge sur quels sont les emplois socialement utiles mais aussi sur quelles activités économiques devraient cesser de détruire la population et la planète, etc. Au vu de l’irrationnalité du capitalisme et du gaspillage de ressources et d’énergie humaine qu’elle génère, nous devons compter sur une réorganisation du travail dans une tonalité éco-sociale et féministe. Il s’agit d’une tâche fondamentale dans la période que nous vivons. Les processus d’accumulation et la crise de la gouvernance néolibérale ont ouvert un nouveau cycle virulent et souvent violent qui cherche à redéfinir les mécanismes de l’exploitation, de la domination et de l’oppression. La contestation de cette redéfinition est un élément clé qui déterminera l’issue du cycle en cours.
Julia Camara et Laia Facet
Article publié sur Vientosur.