La première journée de grève appelée contre la réforme de retraites s’est terminée hier. Si nous n’avons pas encore tous les chiffres, on peut d’ores et déjà dire que cette journée a été particulièrement suivie : 700 000 manifestantEs au minimum (selon la police), 1,5 million selon la CGT. À titre de comparaison, le 1er jour de la mobilisation de 1995 le 23 novembre, avait été compté : 500 000 manifestants selon la police, 1,3 million selon la CGT.
Les taux de grève sont eux aussi très hauts, en particulier dans le secteur des transports à la SNCF et à la RATP, où les syndicats appelaient à une grève reconductible et illimitée dès le 5 : à la SNCF, c’est entre 60 et 90% de grévistes chez les cheminotEs en fonction des professions, 90% des trains qui n’ont pas circulé ce 5 décembre, et une journée du même niveau dès le lendemain. Le secrétaire d’Etat aux transports Jean-Baptiste Djebarri a pourtant déclaré au micro de BFMTV en début de soirée que le gouvernement ne changerait pas de braquet. La RATP a voté largement dans les AG la reconductible pour le lendemain. Alors qu’Air France annonce 30% de vols intérieurs et 10% des moyens courriers supprimés aujourd’hui.
Dans l’éducation nationale, les taux de grèves n’ont pas été aussi hauts depuis de nombreuses années. Si le ministère annonce un peu plus de 40% de grévistes, les syndicats décomptent environ 70% de grévistes dans le premier et second degré. Là aussi, dans la majorité des endroits les AG ont été importantes (300 personnes à Paris pour le premier degré, 200 à Rennes, 150 à Montpellier, 200 à Montreuil). Mais l’auto-organisation, reste encore souvent trop faible : dans de nombreux bahuts, il n’y a pas eu de véritables AG et la reconduction n’a pas été anticipée dans le premier degré.
Dans la majorité des villes, les manifestations ont été les plus importantes depuis de nombreuses années. En particulier dans des petites (ou moyennes) villes : 10000 à Nice, 8000 à Chateauroux, 20000 à Grenoble, entre 20 et 25000 à Rennes… Des AG interpros ont été souvent convoquées à la suite, réunissant là aussi plusieurs centaines de personnes votant la reconduction. Généralement il y avait une petite présence du secteur privé et de Gilets jaunes.
À Paris, la manifestation a été massive aussi, la CGT annonce 250 000 manifestantEs, mais elle a été aussi très fortement réprimée : 87 interpellations et plus de 60 gardes-à-vue. La police a empêché les cortèges d’avancer pendant des heures, continuant la stratégie policière qui a été utilisée depuis la loi travail.
Si cette journée du 5 décembre a été particulièrement réussie, il s’agit à la fin de cette journée de comprendre quel niveau d’affrontement avec le pouvoir nous avons besoin pour gagner.
Le premier élément, c’est que nous avons besoin que la grève reconductible soit effective. Il ne s’agit plus de se reposer sur les cheminotEs (ou la RATP), ce sont l’ensemble des secteurs qui doivent se mettre en grève reconductible dès le lendemain, et dans les prochains jours (là où ça n’a pas été possible de convaincre les collègues).
Ensuite, les directions syndicales confédérales ont été largement contraintes d’appeler à cette mobilisation, et dans la majorité des cas, elles n’organisent pas la reconductible. Ainsi, Philippe Martinez sur RMC ce matin, disait « chercher d’autres moyens que la reconductible pour un certain nombre de secteurs ». La CGT proposera demain à l’intersyndicale deux journées de mobilisation, les 10 et 12 décembre. Pour réussir cette grève et pour ne pas dépendre des seules initiatives des directions syndicales sur les rythmes de la mobilisation, il faut étendre l’auto-organisation : avec des AG sur chaque lieu de travail, mais aussi des AG de secteur, des AG interpro de ville, et des coordinations. À Montreuil, d’ailleurs, une AG interprofessionnelle a rassemblé 500 salariéEs, Gilets jaunes, avec des communaux, des personnels de Radio France et a manifesté vers Paris.
Les prochains jours vont être décisifs pour l’extension du mouvement et la possibilité de déclencher une véritable grève générale qui remette à l’agenda non seulement de retirer la réforme des retraites mais aussi de dégager le gouvernement Macron.
Publié sur le site du NPA.