Les législatives du 7 juillet ont réservé une surprise, que n’ont pas comprise les médias français.

Certes, le parti de droite Nouvelle démocratie (ND) obtient une belle victoire (environ 2 250 000 voix et 39,85% (1 526 000 et 28,09% aux législatives de septembre 2015, 1 873 000 et 33,12% aux européennes de mai 2019). Avec 158 sièges et en tête dans la plupart des régions, il peut former seul le nouveau gouvernement : c’était son objectif. Une belle réussite pour la droite, reposant sur un fort soutien des médias liés au grand patronat pour l’héritier de la dynastie Mitsotakis.

Défaite pour Syriza, mais… 

C’est, bien sûr, une défaite pour Syriza, et tous les commentaires sur le « pari perdu du joueur Tsipras » ne peuvent pas cacher la cause fondamentale de la défaite : l’immense déception créée par le renoncement à une rupture avec la troïka, et le maintien, en dépit de quelques améliorations sociales, du chômage, des bas salaires et de la précarité. Pourtant, après son mauvais score aux européennes (1 343 000 voix, 23,75% des suffrages, contre 1 926 000 voix et 35,46% en septembre 2015), et alors que plein d’ « experts » lui prédisaient une nouvelle chute, c’est l’inverse qui s’est produit : avec 1 781 000 voix et 31,53%, Syriza résiste assez fortement, d’où la hargne hier du Pasok (sous le nom de Kinal, il obtient 8,1%, en léger progrès) et la mauvaise humeur du KKE (PC grec), qui avec 299 000 voix et 5,30%, continue à perdre et en pourcentages et en voix (en 2009, 517 000 voix et 7,54%).

Syriza arrive en tête dans de nombreux quartiers populaires, et dans plusieurs régions : toute la Crète, l’Achaïe (40% contre 32% à ND), les zones ouvrières de l’Attique. Il retrouve la tête dans des mairies perdues par la gauche : Haïdari, Egaleo, Kaisariani. On peut ainsi dire que la défiance populaire vis à vis de Syriza s’est exprimée avant tout par l’abstention, phénomène qui s’accroit : 42,1%, contre 36,1% en janvier 2015. Et surtout les chiffres de participation locale renforcent cette abstention de classe : souvent de 65, voire plus de 70% de participation dans les banlieues bourgeoises, contre 50-55% dans les banlieues ouvrières (à comparer aux 63 à 67% en janvier 2015 !).

Quelles perspectives ?

La ND a fait le plein des voix, siphonnant les groupes centristes et une partie de l’extrême droite : d’un côté Chryssi Avgi (Aube dorée) perd ses députés, mais un autre groupe fasciste, Elliniki Lyssi, y fait son entrée (3,7%). Même si le politicien Mitsotakis répète qu’il gouvernera pour l’union de tous les Grecs (mais les autres ?!), le programme ultra libéral que veut appliquer la ND risque de pousser le curseur très à droite, avec un discours sécuritaire révélateur du poids de l’extrême droite dans les cadres de la ND (plusieurs ont été élus).

Face à cela, la gauche doit en premier lieu faire ses bilans, en particulier la gauche anticapitaliste Antarsya, qui n’obtient que 23 000 voix et 0,41%, et est profondément divisée (la scission de Syriza LAE/Unité Populaire obtient 0,28%…). Mais surtout, il faudra dépasser le paradoxe de voir toute la gauche anti-mémorandum s’affaiblir davantage pendant que de nombreux jeunes et travailleurEs disent leur espoir de résistance en continuant de voter Syriza malgré les politiques menées depuis 2015… Ce qui est urgent est, d’une part, la relance de la construction d’une large gauche anticapitaliste dépassant le seul cadre d’Antarsya et, d’autre part, la bataille, difficile vu le poids du sectarisme, pour lancer des fronts uniques de résistance associant gauche révolutionnaire, radicale, KKE et Syriza (et même Mera 25, de Varoufakis, qui entre au Parlement).

À Athènes, A.Sartzekis pour le NPA.